mercredi 30 mars 2016

Les extraterrestres sont-ils sourds et muets ?


Les extraterrestres, dont il s’avère de plus en plus qu’ils doivent être nombreux si l’on en croit le nombre grandissant d’exoplanètes (1) découvertes par les astronomes, restent sourds à toutes nos tentatives de contact. Qu’en déduire ?


En 1950, le grand physicien Enrico Fermi doucha l'enthousiasme de ses collègues entichés de la thèse d'une vie extraterrestre (E.T.) intelligente partout déployée en soulignant la situation paradoxale, qui prévalait déjà : « Si les E.T. sont si nombreux autour de nous pourquoi restent-ils cachés ? »

Un demi-siècle plus tard, cette interrogation se fait encore plus criante. Au point que l’idée que l’humanité soit une singularité de la Création regagne du terrain. L’homme serait seul dans l’Univers ! Quelle désespérante éventualité ! Avant d’en arriver à cette extrémité, il faut épuiser toutes les autres alternatives. Heureusement, il en reste encore.

Les échecs des écoutes SETI
C’est l'Américain Frank Drake qui le premier, dès le 11 avril 1960, à 6 heures du matin, braqua vers la voûte céleste la grande oreille du radiotélescope de Greenbank, nouvellement équipé d'une antenne réceptrice d'un diamètre de 45 mètres. Son but : voir si les deux chercheurs de l’Université Cornell, G. Cocconi et P. Morrison, ont eu raison d’écrire, en 1959, dans la prestigieuse revue Nature : « La présence de signaux interstellaires est totalement consistante avec tout ce que nous savons et, si des signaux sont présents, le moyen de les détecter est entre nos mains ».

Drake veut passer à l’acte. Il lance le projet Ozma, du nom d’un pays imaginaire Oz inventé par L. F. Baum dans un livre pour enfants. C’est la naissance de SETI, acronyme de Search for Extraterrestrial Intelligence (Recherche d’une intelligence extraterrestre).

Mais rien ne vient concrétiser cette écoute si ce n’est cette alerte du fameux signal WOW capté, le 15 août 1977, par la Grande Oreille de l’observatoire radio de l’Etat de l’Ohio pointé vers la constellation du Sagittaire. Son nom provient du mot écrit ce jour-là sur l’enregistrement en face du pic de voltage d’une durée de 37 secondes, par le préposé d’astreinte : amplitude 30 fois supérieure au bruit de fond ! Hélas toutes les autres écoutes postérieures en cette même direction n’ont plus rien donné.

Malgré l’entrée en lice de la NASA, en 1983, le projet SENTINEL, le projet META/SETI (de Mega Channel ET Array), l’aide de Steven Spielberg, l’opération SERENDIP la bien nommée (2), le programme SETI/MOP (pour Microwave Observing Project) de 1990, la cérémonie de relance qui marque le 500ème anniversaire (12 octobre 1992) de la découverte du nouveau monde par C. Colomb, en 1994, le congrès américain n’accorde qu’un seul million sur les 14 demandés « pour clore dignement le projet » (sic) ! SETI doit se tourner vers les fonds privés. Microsoft, Hewlett Packard, Intel, les géants de l’informatique le soutiennent mais ce n’est pas suffisant. En 1997 le SETI Institute en association avec la SETI League fait appel aux bénévoles pour traiter ses données. C’est la naissance du projet SETI@Home où les possesseurs d’ordinateurs peuvent laisser leur machine branchée pour trier les signaux reçus par les antennes SETI, en décalé. A ce qu’on nous dit, les signaux candidats s’accumulent mais aucun d’eux ne répond au critère de répétition imposé par les pontes du SETI pour avoir une chance d’être artificiel. Aucun sauf un !

Le scoop de SETI@Home
Un signal extraterrestre intelligent a enfin été capté ! Cette nouvelle est tombée en septembre 2004 dans l’indifférence la plus totale entre les jeux olympiques et la prise des otages à Bagdad !
Elle a été lancée par la revue scientifique britannique New Scientist ! Après examen, il ne s’agit, hélas, nullement d’un signal capté récemment mais d’un épiphénomène détecté par la moulinette informatique du projet SETI@Home : la recherche des extraterrestres à domicile !

Lancée il y a sept ans, cette initiative a consisté à confier, après enregistrement préalable, l’analyse des signaux captés par le grand radiotélescope d’Arecibo, à Porto Rico, à des millions de propriétaires de PC (ordinateurs personnels) mettant à disposition leur bécane lorsqu’ils ne s’en servent pas. Il suffit, pour eux, de laisser la machine branchée et, lorsque l’économiseur d’écran se met en marche, il active en même temps le logiciel de décryptage du bruit de fond de l’écoute du ciel et en isole les pics qui en sortent. Des techniques statistiques se chargent de dire si ce pic est imputable à des phénomènes connus ou non : objets astronomiques ou autre artefact.

Or, en l’occurrence, un gaussien barycentriquement corrigé (c’est le terme employé pour cet éventuel message extraterrestre !) a donc été détecté dans les enregistrements de ce qu’a capté Arecibo en février 2004, lorsqu’il visait une région du ciel, située entre les constellations du Poisson et du Bélier, dans un « trou » où il n’y a rien à moins de 1000 années lumière !

Ce qui place ce signal parmi les meilleurs candidats (il y en aurait eu déjà près de 200 !), c’est qu’il s’est produit trois fois (temps de réception = une minute au total !), les autres, généralement, ne s’étant pas répétés. Trois fois, tel que détecté par trois ordinateurs du réseau SETI@Home dont un en Allemagne, à Nuremberg, et un autre dans le Wisconsin.

Comme si déjà cette technique indirecte ne douchait pas suffisamment notre enthousiasme, il fut ajouté par ailleurs, que le signal était faible, que, bien qu’utilisant la longueur d’onde de l’hydrogène, il dérivait rapidement et que, si une planète en était la source, celle-ci, compte tenu de la fréquence de cette dérive devait tourner sur elle-même, 40 fois plus vite que la Terre ! Si des extraterrestres nous ont fait signe ainsi il y a 10 siècles et s’ils comptent les jours comme nous, cela fait 40 x 1000 années à eux qu’ils se sont manifestés. 40 000 ans. De quoi leur avoir laissé largement le temps de succomber au tournis - sont-ils de la race des derviches ? - infligé à leur métabolisme par leur planète en rotation vive.

Pas de panique !
L’annonce du New Scientist a donc fait long feu ! Pas de panique du style Guerre des mondes d’Orson Welles à l’échelle planétaire, comme on le redoutait, pas un effondrement de toutes nos valeurs, pas une remise en question de notre statut, si ce n’est la réélection d’un Maître du Monde qui veut abolir la théorie de l’évolution de Darwin dans les livres scolaires… Bref pas un énorme chamboulement.

Pourtant, pour éviter ce cataclysme culturel, un code de conduite avait été écrit en 1985, peaufiné à Breighton en 1987 et, enfin, une déclaration de principe avait été rédigée et publiée en avril 1989 disant que quiconque détectera quelque chose devra aussitôt en référer aux autorités, la communauté scientifique en l'occurrence, surtout pas au public. Il faudra, dans tous les cas, que le signal ET potentiel soit examiné par un panel d’astronomes indépendants avant d’être divulgué.

Un délai de 10 ans était même avancé entre la détection du signal et le jour où nous en serions avisés après qu'il eût reçu le label de la crédibilité scientifique à travers diverses consultations internationales appropriées, et ceci mené dans le plus grand secret pour ne pas susciter la suspicion de l'homme de la rue.

La validation devait se faire sous l'égide des plus hautes instances en la matière, à savoir l'Académie Internationale d'Astronomie et la IAU International commission, lesquelles devront trouver le moyen adéquat de répandre la nouvelle en évitant ses conséquences présumées… Tout cela semble d’une autre époque. Aucune de ces procédures n’a été appliquée en septembre dernier. D’où peut-être la relégation dans les oubliettes d’un appel E.T. ?

Le mystère de notre solitude reste entier
L'absence de preuve des extra-terrestres dans le ciel est-elle la preuve de leur absence ? Sont-ils désintéressés par le contact. Le redoutent-ils ? Sont-ils des créatures sourdes et muettes ? Car depuis les débuts de la radio et de la télévision, il y a des signaux qui se sont échappés de la Terre à plus de 50 années lumière et ce qui a dû nous signaler à l’attention de toute civilisation écoutante jusqu'à cette distance. S’il y en a !

Le style de vie de toutes les civilisations E. T. conduit-elle infailliblement à des sociétés contemplatives tournées sur leur nombril et non vers autrui ? Les aspirations des extraterrestres sont-elles si différentes des nôtres que nous avons des difficultés à les comprendre ? Ont-ils tous abandonné la technologie pour se tourner vers la méditation, la philosophie et l’art abstrait ?

Avant de conclure dans ce sens, posons-nous plutôt la question de savoir pourquoi toutes ces créatures supérieures à nous auraient décidé de nous boycotter voire de nous laisser dans l'expectative de notre isolement universel.

L'éventualité la plus souvent avancée par les contempteurs du paradoxe de Fermi est celle de la mise en quarantaine de l'humanité. Pour une raison non encore élucidée, que l'on aime à penser bonne à notre endroit, les E.T., conscients de notre présence et même de nos capacités intrinsèques (QI) ont-ils décidé de ne pas nous fréquenter ? Pour un laps de temps déterminé ou éternellement ? Qu'est-ce qui peut les pousser à un tel ostracisme à notre égard ? Le fait, maintes fois constaté à notre échelle de l'effet nocif du mixage de deux civilisations arrivées à des stades par trop différents ? Combien de tribus autochtones d'Afrique ou d'Australie ont sombré dans la décrépitude suite à leur ouverture sur le monde occidental porteur d'armes meurtrières et de Coca Cola ?

Mais la contamination culturelle, agrémentée du choc psychologique que créeraient de Grands Frères du Cosmos superintelligents et, peut-être, en forme de poulpes à gros yeux globuleux, possède bien d'autres alternatives.

Sommes-nous infestés par quelque chose dont nous ne soupçonnons même pas les effets répulsif vis-à-vis des nos congénères cosmiques ? Sommes-nous atteints d'une dangereuse maladie contagieuse que les E.T. redoutent d'attraper. Le cancer ? Le SIDA ?

Et il y a bien pire. Par exemple la mortalité est une maladie qui fait des ravages sur Terre. Les E.T. sont-ils immortels, eux ? Ou bien la bêtise largement répandue quelles que soient les ethnies et les couches sociales ? L'orgueil est aussi un virus dévastateur typiquement humain à nous inculqué et la perspective de le partager peut rendre nos Supérieurs reluctants à voisiner avec nous. Toutes ces tares, qui rendraient l'homme inapte, pour toujours, à entrer au sein du club des civilisations galactiques intercommunicantes (le Club Galactique de Ronald N. Bracewell) depuis des lustres - c'est la théorie de la plupart des exobiologistes, les spécialistes en ce domaine - vouent-elles derechef tout programme SETI quel qu’il soit à un échec absolu ? C’est là que l’énigme des ovnis pourrait percer un trou dans la cuirasse de tout ce bel édifice conduisant à notre isolement.

Une autre supposition, pour justifier la complète indifférence des E.T. à notre égard, est qu'ils ne nous portent, qui sait ?, pas plus d'intérêt que nous n'en témoignons vis-à-vis des fourmis. Le saut d'intelligence entre eux et nous peut être aussi incommensurable que celui qui existe entre nous et les insectes dont nous partageons la laborieuse industrie sur Terre. Dans ce cas, qu'auraient-ils à gagner à se signaler à notre grossière et rudimentaire attention ? Que des piqûres !

Sur la foi d'un tel raisonnement, certains s'insurgent qu'en tentant de repérer les E.T., lesquels ne le souhaitent manifestement pas, nous nous attirerons leurs foudres. Et, poursuivant l'analogie, de quel effroyable humaniticide sont-t-ils susceptibles d'user pour nous empêcher définitivement d'enfreindre la loi du silence dans laquelle ils nous ont enfermés ? En tout cas, voilà une question qui reste pendante et l’obtention d’une réponse devrait être au cœur des objectifs du 21ème siècle.

Notes :
1/ Planètes extérieures à notre système solaire.
2/ La sérendipité, c’est le processus de découverte par hasard !



Publié dans UFOMANIA, n° 42, février 2005

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