jeudi 24 mars 2016

L’« orthoténie » : artefact statistique, erreur méthodologique, mirage ou illusion ?



Quatre ans pour passer des lueurs à l’illumination ! C’est le temps qu’il fallut, semble-t-il, entre 1954 et 1958, à Aimé Michel, pour aller d’un intérêt purement documentaire vis-à-vis des soucoupes volantes (SV) exposé dans son premier livre (1)  à un éblouissement face aux alignements des lieux d’observation de celles-ci ; un constat qu’il voulut ériger en théorie sous le nom d’« orthoténie » (2) qu’il immortalisa sous ce nom et dont, finalement, sa réputation aurait très bien pu se passer tant cette thèse fut mal comprise, dénoncée comme hasardeuse et finalement abandonnée comme illusoire, lui-même avouant s’y être égaré, mais seulement après 20 ans et, apparemment en pleine connaissance de cause !


Encore en 1977, dans la réédition de son livre Mystérieux Objets Célestes (MOC) parue chez Seghers (3c), il reconnaissait s’être cru le premier ufologue à avoir mis en évidence, derrière l’énigme des ovnis, une technologie d’une efficacité et d’une virtuosité prodigieuse manœuvrant en 1954 dans le ciel et sur le sol d’Europe, y réalisant un plan dont ni le but, ni l’origine, ni les motifs ne se laissent encore soupçonner ; une évidence qualifiée bien imprudemment de scientifique. Sous une réserve toutefois de taille, à savoir que cette fantasmagorie qui le fascinait toujours soit un phénomène réel… Eh oui, il lui était déjà largement permis d’en douter si ce n’est pire car on se demande comment il a pu s’y accrocher si longtemps et ainsi soutenir le mythe parmi ses lecteurs de 1958 et de 1977 !

Rares sont ceux qui, aujourd'hui, se rallient encore à ce concept d’ « orthoténie » vu généralement comme celui d’apparitions d’ovnis en ligne droite, tel que rapporté par Jerome Clarke (4) dans sont encyclopédie publiée en 1998 ; pourtant autant de place y est consacrée à l’« orthoténie » qu’au nom de son auteur, ce qui paraît bien disproportionné tant l’œuvre d’Aimé Michel est riche en autres multiples réflexions philosophico-ufologiques éclipsant de loin la notion d’« orthoténie » : ne fut-il pas convaincu dès les années 1970 que le phénomène ovni représente quelque chose se situant  au delà de la compréhension humaine ? Une vision futuriste dont on devrait tirer leçon encore aujourd'hui en 2008 ! Personnellement, je suis un grand admirateur d’Aimé Michel et je le considère comme le plus grand ufologue français de tous les temps, nonobstant son épisode « orthoténique » qui, hélas, nous égara tous autant que lui et dont nous subissons les séquelles.

Aussi, n’est-ce pas à charge contre lui que j’entreprends cette étude, mais pour comprendre comment il a pu ainsi s’(auto)fourvoyer et nous entraîner avec lui dans le bateau de l’« orthoténie » ; aussi pour laver le cerveau des ufologues qui, comme moi, ont mordu à cet hameçon et ont encore du mal, 50 ans après, à s’en débarrasser. Car comme l’exprimait très justement en 1987 Claude Maugé (5) : l’« orthoténie » a converti quelques scientifiques (scientists) à l’ufologie. Je fus l’un de ceux-là  justement à une période où A. Michel était à mon sens le plus convaincant orthoténiquement parlant.

Ufologie à la française exportée en Amérique
Le premier livre ufologique d’A. Michel « Lueurs sur les SV » (1954), contrairement à ses dires (6), lui avait valu un certain succès (en France et dans le monde – traduction en anglais) au point que son second ouvrage en la matière qu’il consacra à la fameuse vague française de 1954 (3a), y exposant sa théorie « orthoténique », parut en 1958 en Amérique quelques mois avant la version française avec un titre autrement plus provocateur (7) : titre américain : « Les soucoupes volantes et le mystère de la ligne droite » !

Pourtant le texte américain était sensé être la « traduction »  du français, selon l’auteur. Or, quand on met les deux versions en parallèle (j’espère ne pas être le premier à le faire, ayant lu la version américaine avant la française), les différences en sont si flagrantes et significatives qu’elles ne peuvent s’expliquer à l’évidence par le passage d’une langue à l’autre : les paragraphes sont souvent déplacés, notamment ceux touchant à l’ « orthoténie », certaines digressions supprimées, bref, dans le texte américain, la notion d’« orthoténie » semble beaucoup mieux explicitée, ordonnée, que dans la version française, moins dispersée, délayée au fil du récit et obscurcie souvent par des commentaires plutôt abscons absents en anglais, rajoutés ; comme si l’auteur, à quelques mois d’intervalle, était déjà assailli de doutes...

Ainsi, une vingtaine de pages de la version française ne figurent pas en anglais et un pointage montre qu’elles parlent très souvent d’hallucination, de télépathie, de coïncidences de confusion du MOC avec « autre chose » : ballon, feu de Saint Elme, avion, hélicoptère, etc. Tout cela ajoute à la confusion.

Fut-ce une traduction épurée par rapport à l’original, notamment par le traducteur, qui a éliminé ce qu’il ne comprenait pas ou savait déjà faux (on va voir pourquoi) ? A. Michel, dans le court laps de temps séparant les deux parutions a-t-il voulu faire des corrections, ajouter des commentaires ? Il est vrai que le traducteur Alexander D. Mebane (8) fut un des premiers à mettre en cause la justesse des calculs mathématiques d’A. Michel sur lesquels il fonda imprudemment sa théorie, l’obligeant déjà à bémoliser son enthousiasme et revoir sa copie (pas en tout cas mathématiquement parlant) avant même la sortie de la version française ?

Deux autres exemples des différences entre les textes anglais et français : à propos de la thèse psychologique, les trois lignes qui y sont consacrées en américain deviennent 25 en français, si bien qu’on ne sait plus si en fait la loi de propagation en droite ligne est bien celle des ovnis ou celle des bobards (suggestion par J. Bergier (1912-1978)) que démontrent les alignements découverts par A. Michel.


Aussi, concernant le sens des alignements, il fut épargné aux lecteurs anglo-saxons ce syllogisme fumeux propre à prêter à confusion : l’alignement aléatoire d’un phénomène psychologique (thèse de l’hallucination, mensonge et mystification) n’a aucune chance de se produire ; or, toutes les explications connues du phénomène soucoupe se ramènent à un phénomène psychologique ; donc l’alignement aléatoire du phénomène soucoupe volante est impossible (3a page 128).

Autre anomalie : sur la jaquette du livre en américain, l’auteur français est présenté comme mathématicien et ingénieur. Or, dans la réédition de MOC (3c), A. Michel décrit sa formation surtout psychologique et philosophique reconnaissant avoir étudié quelques mathématiques et avoir obtenu un diplôme d’ingénieur… du son !  Ainsi, on a du mal à voir le même personnage dans ce merveilleux philosophe féru de mysticisme décrit par les Américains comme un savant et expressément présenté surtout pas comme un rêveur.

Or l’« orthoténie », considérée comme la preuve d’une exploration intelligente de la Terre, fit rêver bien des ufologues, moi y compris surtout quand épurée originellement des premiers doutes de son auteur. Et il n’y a pas de honte à cela, n’est-ce pas ?

A mon humble avis, c’est justement grâce à ses visions profondes du phénomène soucoupe, entre autre (il en vint en fin de vie à confier modestement que tout ce dont il était certain à propos des ovnis tiendrait aisément sur un timbre poste !), qu’A. Michel permit à toute une génération d’ufologues (dont je fais partie) de rêver le phénomène ovni autrement qu’en terme de lumières célestes évanescentes dans la nuit ou de fantasmes d’individus imbibés d’alcool ou de science-fiction ; et non à cause de ses calculs mathématiques simplistes, comme on va le voir ! Ou plutôt si en admettant que son bas niveau en mathématiques - et particulièrement en calcul statistique - lui permit de s’enthousiasmer sur quelque chose qu’un statisticien aurait rejeté d’emblée  et, par là même, d’accréditer la théorie en vogue à l’époque : celle qualifiée de tôles et boulons à laquelle nous adhérions !
Avant de passer à l’aspect calculs  de l’ « orthoténie » qui effectivement fut sujet à bien des commentaires, revenons à la source d’inspiration d’A. Michel et aux circonstances de sa découverte dont l’auteur donnait quelques détails tout d’abord dans le mensuel Science & Vie (9) de février 1958 et dans un article paru ultérieurement dans Planète (10) en 1963 (pas toujours en concordance ici non plus d’ailleurs, hélas). On peut y lire déjà exprimé au passé en 1963 : Il y avait bien quelque chose derrière le chaos de 1954 (observations multiples de la vague) et ce quelque chose commença à m’apparaître en 1957.

Euréka ! Les témoins de soucoupes alignés comme à la parade !

En compilant les rapports d’observations (11) pour son deuxième livre et en se focalisant non plus sur le phénomène aérien mais sur les récits des témoins, A. Michel fait sa découverte. Un peu par hasard, comme il l’explique dans Science et Vie accréditant l’idée de ce que les Américains appellent la sérendipité : on cherche quelque chose et on trouve autre chose. Nombre de grandes inventions y ont trouvé leur chemin.

A cette époque (fin 1956), il se rappelle d’un conseil du poète Jean Cocteau (1889-1963) donné à lui deux ans plus tôt : - Tu devrais chercher, lui avait-il dit, si toutes les soucoupes n’obéissent pas à quelque ordre que nos yeux, à première vue, ne pourrait soupçonner  (12). C’est, semble-t-il, le remords de l’attitude mesquine de négliger cette suggestion du poète, de rechercher d’abord la preuve et de refuser aux nombreuses mauvaises observations la possibilité d’être vraies, qui le poussent à faire comme si et à porter sur une carte tous les témoignages du 14 octobre 1954 (version 1963, déjà romancée ?). Pourquoi ce jour-là ? Parce que les observations sont nombreuses et rassemblées dans une zone restreinte.

La version 1958 est un peu différente. A. Michel, en 1954, suite à la suggestion de J. Cocteau, prend une carte de France au millionième et passe de longues semaines (sic) à y repérer exactement les lieux d’où émanent tous les récits de témoignages ovnis de ses dossiers. A chaque endroit ainsi localisé, il pique une punaise de couleur. Premier constat visuel : TOUTE la France a vu des soucoupes volantes ! C’était bien, écrit-il, le chaos irrémédiable (répartition aléatoire) prévu par les interprétations les plus sceptiques à savoir un mélange de phénomènes classiques naturels non reconnus (halos, bolides, météorites, ballons-sondes, avions, hélicoptères, Vénus, Mars etc.) et de mensonges, d’hallucinations, de facéties…

Ce premier pointage donc fin 1954 sur une carte de France des centaines d’observations de l’année - débarrassé des cas mal prouvés et douteux (les bonnes seulement (Scornaux)) - ne donne rien. Deux ans plus tard, il revient donc sur cette notion d’ordre et classe les observations en diurnes et nocturnes : toujours rien. Puis, région par région… Et il arrive à la région Bourgogne, Lyonnais, Franche-Comté : J’eus pour la première fois l’impression de distinguer quelque chose de singulier, d’anormal, écrit-il. De Poligny jusqu’à Gueugnon (S. & L.), cinq punaises présentaient une disposition rigoureusement rectiligne sur une distance de 130 km. Dans ses dossiers, il cherche à quoi correspondent ces cinq observations et, première surprise, toutes étaient datées du même jour : le 14 octobre 1954 entre 18h 30 et 19h 35.

Deuxième surprise : les observations ne peuvent correspondre en aucune façon, ni à l’hypothèse d’un bolide (une des observations parle d’un objet posé au sol !), ni à celle d’un hélicoptère même avec des détails ajoutés par des témoins imaginatifs. Et là, dans un geste désespéré pour échapper à une aussi merveilleuse série de coïncidences » - c’est le mot approprié si on reste sur l’interprétation aléatoire  - A. Michel se dit : - Au lieu de piquer sur ma carte toutes les observations de la saison, pourquoi ne pas essayer de sérier les jours ? Reprenant tout à zéro sur ce principe, c’est l’illumination. Le désordre apparent résultait-il d’un mélange de plusieurs ordres ? SI.

Et A. Michel, armé d’une règle, se met à rejoindre par des lignes droites les lieux de témoignages de la vague d’octobre à novembre 1954, jour après jour : il obtient des centaines de lignes à trois points (c’est bien le minimum, on le verra), des de quatre, quelques de 5 et une de six ! Dans une proportion qui dépasse souvent 90 %, la plupart des observations se situent sur des lignes droites valables 24 heures seulement, l’heure critique où les droites d’un jour s’effacent pour faire place à de nouvelles droites se situant vers 1 heure du matin. Déjà là, il est difficile de trouver d’où sont tirés ses calculs si ce n’est d’une estimation pifométrique. Mais il vient de découvrir les alignements ; la fièvre « orthoténique » va le tenir pendant plus de 20 ans et marquer l’ufologie mondiale de façon indélébile au point qu’aujourd’hui encore on en ressent les répercussions.

Pour l’instant, voyons comment Michel tenta de décrire cet ordonnancement soucoupique car, dès l’instant de la découverte, il lui apparut que ces lignes ne correspondaient pas, hélas, aux trajectoires des ovnis.

La ligne droite « clé du phénomène soucoupe »
Premier constat : l’alignement des observations ne signifie pas que ce qui a été observé se déplaçait en ligne droite (13) malgré le fait que souvent, la trajectoire de l’ovni indiquée par le témoin correspondait à l’alignement ! La preuve est là aussi fournie opportunément par hasard avec le bolide observé le 17 novembre 1955 visible depuis la France, la Suisse, l’Italie, l’Allemagne : les lieux d’origine des lettres reçues à son propos par l’observatoire de Paris sont répartis sur la carte de façon absolument aléatoire. Pourquoi un objet lumineux survolant le pays à plusieurs dizaines de km d’altitude au moins n’aurait-il été aperçu que sur sa projection orthogonale ?, s’interroge A. Michel. La question est valable aussi bien pour un météore (bolide) que pour un hypothétique objet qui aurait produit l’alignement des observations du 24 septembre 1954 Bayonne-Vichy dit BAVIC, comme on le verra. Donc un alignement des points d’observation ne signifie nullement une trajectoire rectiligne de l’objet observé !

Second constat, apte en effet à doucher l’enthousiasme : la succession de la ligne n’a rien à voir avec la succession chronologique, il y a désordre sur la ligne ; exemple lundi 27 septembre 1954 : ligne Perpignan (15h)-Foussignargue (2 h du matin)-Lemps (22 h 15)-Premanon (20h 30)-Mulhouse (minuit) ; ça se complique ! Pour sauver les meubles  A. Michel doit concéder que ceci montre que les mêmes alignements peuvent être pris en charge par des objets différents à des heures dont la succession n’a rien à voir avec le sens du déplacement ! Ainsi, en général, les lignes ne correspondent pas à la trajectoire d’un simple objet mais à un couloir de circulation dans lequel les soucoupes vont et viennent d’un côté et d’autre. D’autant que des objets vus sur la même ligne sont différemment décrits au point qu’il est difficile d’en attribuer une forme unique déformée par les témoins.

Et pourtant la solution était dans cette idée, persiste-t-il encore en 1963. Dans une nouvelle introduction à la version de 1977 (3c), où A. Michel ne prononce pas une seule fois le mot « orthoténie », il écrit que ce qui le décida à publier son 2ème livre, ce fut le sentiment que j’avais peut-être trouvé une méthode scientifique (…) pour permettre une étude objective du phénomène SV. En 20 ans, le peut-être était symbolique de ses doutes mais aussi de sa fidélité à l’« orthoténie » malgré les critiques !

Déjà en 1958, et après avoir brièvement évoqué l’hypothèse psychologique (qualifiée en anglais de dérangement mental ou de mensonges !), les doutes assaillaient le découvreur au point de lui faire consacrer 165 lignes en français contre seulement 91 en anglais à la possibilité que ces lignes puissent être formées par hasard. Mais là où ça se gâte c’est quand l’auteur veut évaluer la probabilité de cette hypothèse.

Carence mathématique du traitement des données
Pour ce faire, il veut estimer la probabilité pour que la ligne droite BAVIC de 6 points soit formée par pur accident : à partir de la longueur de cet alignement (485 km), il estime une aire de dispersion possible (cercle de distribution possible en anglais) de 185 000 km2 environ (cercle de 485/2 km de rayon !). Supposant un battement de 8 km (distance maximum de l’objet réel à l’observateur !), il calcule un rectangle de 3880 km2 (485 x 8) (qualifié de corridor en anglais, pas en français !) où les 6 objets vus furent localisés.

Puis il pose le problème statistique en ces termes : Dans une aire de 185 000 km2, combien faudrait-il d’observations réelles réparties au hasard pour avoir une chance d’en avoir quatre (pourquoi 4 ?) dans le rectangle ? Et il accouche de la solution : 190 ! Résultat de l’opération : (185 000 x 4)/3 880. Puis, crânement, il infère que puisque, ce jour-là, il n’y a que 7 observations (il ne compte pas les deux extrêmes ?), on peut donc parier 190 contre 7, ou 27,1 contre 1 que l’alignement Bayonne-Vichy n’est pas un effet du hasard.

On verra que son traducteur infirme totalement ce résultat et qu’il y a là du grain à moudre pour son grand détracteur : le Dr D. H. Menzel. Mais on n’en est pas encore là.

Accueil enthousiaste des ufologues
A sa sortie en France, Mystérieux objets célestes fit sensation (Toulet, 1967) auprès des ufologues. Comme je l’ai dit l’« orthoténie » va dans le sens des croyances du temps : à savoir que les soucoupes volantes sont des vaisseaux spatiaux en mission d’exploration sur la terre ; les va-et-vient mis en évidence par l’« orthoténie » dans des couloirs enchevêtrés semble compatible avec un quadrillage de la zone explorée. Selon R. Fouéré (1904-1990), le second livre d’A. Michel suscita chez les partisans de la réalité des soucoupes volantes une surprise émerveillée et un immense enthousiasme (14). Du coup, les ufologues étrangers et pas des moindres tentèrent d’appliquer le modèle « orthoténique » aux vagues enregistrées dans leur pays : A. Ribera en Espagne, (vague de 1950, droite tracée à la main : maximum de 3 points (27 mars) et de 4 sur la semaine du 23/03 au 31/03/1950), O. Fontes au Brésil (1960), J. Vallée en Afrique du Nord (15), la plupart donnant les résultats de leurs travaux « orthoténiques » dans la revue ufologique britannique Flying Saucer Review qui jouissait, à l’époque, de la réputation d’être la meilleure du temps (16) et où se développa justement entre 1964 et 1974 l’âpre débat sur l’« orthoténie ». L’ufologue belge J.-G. Dohmen, en 1972, crut découvrir des couloirs privilégiés à soucoupes  en Belgique sans s’imposer de période temps d’après les observations belges ! J. Vézina et M. Leduc firent de même au Québec, en 1983.

Toutes ces tentatives ne furent que de pâles imitations des réseaux de Michel : de la pseudo-orthoténie.

Des personnages célèbres comme Paul Misraki (17) (1908-1998)  et Rémy Chauvin (18) (1913-mort depuis en 2009) furent d’ardents « orthoténistes ». Certains même cédèrent à une véritable orthoténimania en voulant à tout prix placer en ligne droite divers autres phénomènes qualifiés de connexes : les cavernes peintes [à tout auteur tout honneur : cavernes préhistoriques Michel (19), 1969], sources thermales (F. Lagarde, 1970), foudre (J. Bastide, 1972), lieux de naissance d’hommes illustres (20) (J. C. Dufour (1974) et même théâtre d’événements paranormaux (A. Druffel, 1983).

Emporté par son succès et peu ébranlé par les critiques qui ne l’épargnaient pas, on le verra, Aimé Michel persista jusqu’en 1963 date à laquelle il prônait une orthoténie globale (20).

Globalisation de l’« orthoténie » et autres structures
En prolongeant les alignements à des grands cercles, A. Michel voulait accréditer une « orthoténie » globale (à l’échelle du globe). Or le prolongement de BAVIC traversait en effet des pays où cinq vagues d’ovnis avaient été observées depuis 1954 : Europe de l’Ouest, USA (1957), Brésil, Nouvelle Guinée (1959) et Nouvelle Zélande (1960). Est-ce que les lignes « orthoténiques » françaises s’étendaient hors du territoire avec des périodes pouvant déborder les 24 h (plus de raison que les SV aient leur chronomètre de bord callé sur l’heure GMT = temps moyen de Greenwich valable en France) ? A. Ribera, en 1963, plaçaient 4 observations de 1950 en Espagne sur la ligne BAVIC prolongée et une de 1936 !

Par ailleurs, outre le mystère de la ligne droite, les lignes tracées entre les points d’observation à partir du 2 octobre 1954, selon A. Michel, commencent à offrir un spectacle fascinant : il y a convergence des lignes en étoile presque au même endroit (Poncey en l’occurrence) : des centres de dispersion « orthoténique » ! Ce qui correspondait à un dessin de J. Bergier tracé sur la nappe où ils déjeunaient ensemble longtemps auparavant et qui avait dit sur le ton de la boutade : Ce qui serait amusant, ce serait de trouver un jour quelque chose comme ceci.


Et voilà que cela se confirme le 7 octobre (Montlevicq), 11 octobre (Montluçon) !
Ainsi apparaît une « orthoténie » en étoile que Michel croit même superposable d’un jour sur l’autre en faisant coïncider les centres par translation suivie d’une rotation dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. De la sorte, nous avons 4 branches de l’étoile du 7 qui recouvrent 4 branches de l’étoile du 2 et un alignement du 7 qui se superpose à un alignement du 2.

Comble de l’étonnement, Michel discerne des phénomènes particuliers au centre des étoiles : grand cigare vertical dit des nuées, effet de feuille morte dans le mouvement de l’ovni…

Dans l’euphorie « orthoténique », l’idée d’A. Michel était de développer les figures (structures, configurations) produites par les lignes « orthoténiques » locales (réseaux, nœuds, etc.) pour en faire un instrument au niveau des grands cercles. Cette présence de centres de dispersion et ces constantes lui permettent d’étayer le côté intelligent de ce qui se cache derrière l’« orthoténie ».

Il voulait aussi édifier une théorie sur les réseaux que constituaient ces intersections de lignes convergeant selon lui plus souvent que le permettrait le hasard en foyers de dispersion. L’« orthoténie » allait-elle permettre de prévoir le passage d’ovnis en certains lieux, comme le laissait entendre son auteur dans « Planète » ?

Mais, la fièvre « orthoténique » était déjà tempérée par les critiques qui affluaient de tous les azimuts.

Premières critiques
Suite à la parution de « MOC » en France, Jacques Vallée, jeune étudiant « ayant raté mathématique générale », tombe sur Mystérieux Objets Célestes au Bazar de l’Hôtel de Ville à Paris ! Il est frappé par le sujet (il n’avait manifestement pas lu le livre de 1954) et, en 1958, écrit à A. Michel ; ils correspondirent ensuite jusqu’à se rencontrer en 1961 et devinrent amis ; cette rencontre est certainement à l’origine de la vocation de J. Vallée qui devint, on le sait, un ufologue réputé.

Tout ça pour dire qu’on trouve dans le livre de J. Vallée : Sciences Interdites (22), qui est son journal de réflexions couvrant la période 1958-1970, allusion à l’« orthoténie » dont l’aspect mathématique l’avait particulièrement intéressé.

On y apprend ainsi qu’avant 1961 (23), Michel fut accusé d’avoir tracé ses lignes puis d’avoir contacté les journaux locaux pour savoir s’il existaient des observations s’y rapportant et, fut traité d’escroc par les « officiels » de la société astronomique de France. Mais on nous dit que ces critiques furent faites en privé et notamment que P. Guérin (1926-2000) se plaignit à Michel des insuffisances de sa méthode. Bizarre qu’A. Michel attendît jusqu’en 1964 pour seulement réagir après l’attaque de D. Menzel alors que les mêmes accusations en France de ces scientistes tenants du rationalisme avaient moindrement éveillé son courroux.

En fait, initialement, c’est le traitement consécutif par informatique de l’ « orthoténie » globale par J. Vallée qui déchaîna les foudres de D. Menzel lequel en dénonça les pièges dans Flying Saucer Review d’août 1964.

Les objections des statisticiens
Dans la version anglaise du livre (pas dans la française publiée après, pourquoi ?), on trouve en appendice une étude « orthoténique » de la vague américaine de 1957 effectuée par le traducteur A. Mebane, un authentique ingénieur, qui corrobore triomphalement (sic) l’existence d’un tel phénomène en Amérique (or, réellement, il n’en est rien). Fort charitablement, ce n’est pas par la méthode Michel dont il ne fait aucun commentaire qu’il teste l’hypothèse nulle (accidentelle) mais par un calcul irréprochable (Menzel dixit) visant à estimer la probabilité qu’un certain nombre de points placés aléatoirement donnent une droite : l’hypothèse qu’il prend est que le triangle formé par trois points ait un angle proche de 180 degrés centigrades à 1,5 degré près. Et de présenter une formule binomiale qui, en effet, donne une chance sur 500 000 que la ligne BAVIC soit apparue par hasard (6 points alignés sur neuf) mais aussi indique qu’à partir de 9 points, il est normal qu’il y en ait 3 d’alignés, qu’à partir de 22, il y en ait 4, qu’à partir de 30, il y en ait 5, etc. Ainsi les alignements jusqu’à 5 points ne reflètent que la loi du hasard. Tout ce qu’il a trouvé en Amérique, en fait.

L’astronome américain Donald H. Menzel (1901-1976), de l’Université de Harvard, grand négateur des ovnis, ne se contenta pas comme son collègue français Evry Schatzman (1920-2010) d’opposer à Michel une formule du style : vos alignements ne peuvent exister parce que les soucoupes ne peuvent exister !  (sic), mais, dans une objection d’expert, mouilla la chemise en modélisant l’« orthoténie » par la méthode de calcul inaugurée de façon simpliste par A. Michel. Notant que la discussion mathématique (du Français) était pleine d’erreurs évidentes (il avait beau jeu de rapprocher les deux chiffres de probabilité d’une ligne telle que BAVIC due au hasard figurant dans le même livre : une chance sur 190 (Michel) et une sur 500 000 (Mebane) ! et sa formule indiquant le nombre de lignes droites sensées apparaître par hasard complètement fausse, tandis que les formules statistiques de Mebane étaient correctes), Menzel reprenaient telles quelles celles-ci en prétendant faussement une simplification et une meilleure définition du corridor (et pour cause puisque c’est plutôt la base du calcul topographique). Mais il arrivait bien entendu aux mêmes conclusions que Mebane : à savoir que les alignements jusqu’à 5 points étaient le fruit du hasard. Même, il s’étonnait que le nombre de tels alignements signalés par Michel soient parfois moins nombreux que prévu statistiquement (oublis ?).


Sa première intervention parut dans la Flying Saucer Review de  mars 1964 avec le titre de « Les soucoupes volantes se déplacent-elles en ligne droites » et souleva la polémique (24) car il était dit y mettre directement en cause Michel accusé d’avoir triché et quasiment fabriqué le phénomène. J’ai relu attentivement son texte de la FSR et n’y ai pas trouvé les attaques personnelles et les insinuations dites tendancieuses alléguées notamment par A. Michel sinon qu’il mettait en garde l’auteur de la théorie « orthoténique » de ne pas s’être leurré. On verra que l’astronome américain n’avait pas tout à fait tort car, déjà, il évoquait un biais provenant des incertitudes dues aux articles de journaux qui souvent se trompent sur les dates ou donnent des informations approximatives quant à ces dates (prémonition ?). On verra plus loin qu’il avait raison. A sa décharge en outre, j’ajoute que A. Michel ne l’avait pas ménagé dans son premier livre en jetant quelques cailloux dans son jardin (sic) et lui reprochant notamment de faux raisonnements et une ambition hors de raison dans sa thèse des lentilles atmosphériques pour expliquer certaines soucoupes.

Moins rancunier que A. Michel lui-même, dans un livre collectif paru en 1972 (25), D. Menzel revenait sur la question de l’« orthoténie » et laissait de côté les attaques personnelles sans pour autant épargner l’inventeur de l’« orthoténie » auquel il reprochait :
-          le choix arbitraire de minuit à minuit aux lignes « orthoténiques » comme si les soucoupes volantes respectaient l’heure française !
-          la non prise en compte de la distance apparente et l’inclinaison sur l’horizon des ovnis,
-          le même poids statistique alloué aux bonnes et aux mauvaises observations,
-          le non respect des règles qu’il s’est donné au début de son analyse (récupérations d’observations hors de la période de 24 h, de cas isolés hors territoire français sans tenir compte de tous les autres le même jour),
-          et surtout la propension à tester hypothèse sur hypothèse à l’aune de l’« orthoténie » et sur ce que les patterns peuvent signifier eux-mêmes, ce qui réduit les chances qu’une correspondance représente quelque chose de réel, un piège dans lequel, selon lui, même des statisticiens expérimentés sont tombés.

Critiques difficilement contestables (26) même pour les tenants de l’« orthoténie » ; cette fois la réaction de A. Michel fut violente et il traita Menzel de polémiste suite à son intervention de 1964 dans la FSR.

J’avoue ne pas m’expliquer ce haro de Michel sur Menzel ? Lui et ses admirateurs ont-ils voulu passer leurs nerfs sur l’astrophysicien américain anti-ovni pour se défouler de ne pouvoir le faire sur ceux qui l’avaient ainsi mis en cause en France ?

Parmi les autres mathématiciens qui tentèrent de vérifier mathématiquement l’« orthoténie », il y eut tout d’abord F. Toulet (1967), statisticien du G.E.P.A., et Jacques Scornaux (1975) de la SOBEPS. Mais avant, chronologiquement, il y eut l’impact de l’ordinateur.

Entrée en piste de l’informatique
Le deuxième coup fatal porté à l’« orthoténie » vint des simulations de distributions d’observations au hasard sur le territoire français telles que modélisées (27) par J. Vallée sur l’ordinateur de l’Observatoire de Meudon en dehors des heures de travail.
J. Vallée, comme tout étudiant scientifique, était appelé à utiliser les ordinateurs de l’époque qu’on gavait de cartes perforées dans les centres de calcul (28). Leur utilisation pour simuler l’ « orthoténie » ne lui avait pas échappé.

Et là les résultats de Mebane sont corroborés : les alignements de 2, 3 voire 4 points sont pur fruits du hasard. Le calcul des grands cercles passant et lissés par ces points au moyen de la méthode des moindres carrés sur des intervalles de 24 heures montrent, dès le printemps 1962 (22), que la théorie « orthoténique » s’écroule.

L’informatique se prête particulièrement à tester l’hypothèse nulle (dite relevant du pur hasard). J. Vallée, dans son journal à la date du 17 juin 1962, à Paris, écrit : Hier, j’ai terminé le calcul de tous les grands cercles mentionnés dans le livre d’A. Michel, sans y trouver aucune loi. Et, à Chicago où il se trouve en novembre 1963 : Il n’y a plus aucun doute sur ce que révèlent  les statistiques produites par simulation (son programme) : les réseaux d’Aimé Michel peuvent très bien apparaître par hasard et leurs effets se vérifier avec la même précision que les vraies observations. Cela remet en question tout ce que j’ai dit et écrit sur l’orthoténie ; il va probablement falloir détruire tout ce que j’allais publier. Je m’attends maintenant à voir s’écrouler toute la théorie selon laquelle il y aurait un ordre caché derrière les apparitions… » (22, page 85). Vallée reste flou sur la méthode qu’il a utilisée pour faire un sort aux structures en étoiles – et il écrit avoir détruit tous ces calculs (22, page 277) – mais A. Michel lui fait une telle confiance qu’à cette époque, enfin, il abandonne ses prétentions « orthoténiques » pour ne plus que se concentrer sur quelques alignements et   nœuds remarquables.

Il faut croire que J. Vallée changea entre-temps d’avis puisqu’on trouve dans son livre publié début 1966 (29) (dans l’intervalle, il serait devenu docteur en informatique (30), selon J. Scornaux, alors que je me demande bien si ce diplôme existait à cette époque ?), 35 pages consacrées à l’« orthoténie » où il semble mal à l’aise pour l’éliminer ; est-ce son amitié avec son auteur qui le pousse ainsi à temporiser ? On a vu que D. Menzel ne put le supporter. S’ensuivit une querelles de chiffres (Vallée ayant démontré que Menzel s’était trompé du simple au double dans ses calculs !) relayée par la FSR qui n’apporte rien à l’ « orthoténie », ni à l’ufologie.

Il en résulta malheureusement de telles améliorations des méthodes de calcul qu’elles devinrent dès lors inaccessibles au commun des mortels eut-il fait Maths Sup (moi).

J. Vallée va même jusqu’à qualifier l’idée des alignements de remarquable s’interrogeant si elle ne fournit pas un point de départ d’une exceptionnelle valeur pour l’étude sérieuse d’un phénomène (SV) qui peut être d’une capitale importance, non pas pour telle ou telle branche de la science, mais pour l’espèce humaine entière ! (point d’exclamation de moi). Une base de discussion sérieuse de la motivation intelligente des SV.

Et les alignements et les réseaux décrits par A. Michel sont un fait réel. Reste à savoir si la possibilité de leur apparition (naturelle) n’a pas été considérablement sous-estimée. Or, J. Vallée, qui a lu Mebane et Menzel, le sait parfaitement. Et ses simulations sur ordinateur à plaques IBM 1620 corroborent les résultats de ses prédécesseurs mathématiciens : toutes les lignes de 3 à 4 points peuvent être expliquées par le hasard (le hasard explique donc au moins 81 % des alignements mentionnés par A. Michel) et ce d’autant mieux que le critère de distance (grosseur du point d’observation qui a une étendue finie, sauf pour les atterrissages avec trace au sol) passe de 1 à 2,5 km.

Dans certains de ses calculs à partir de « n » observations, J. Vallée démontre même que le nombre d’alignements de 3 points devrait même être supérieur à celui observé ! Ce qui, on l’a vu, incitera D. Menzel à ironiser sur le moindre alignement des observateurs de SV par rapport au hasard (formule : les ovnis évitent les lignes droites !) sans s’apercevoir que cela aurait pu être aussi pris comme une preuve de l’artificialité des parcours des ovnis.

Restent quelques rares alignements inexplicables selon J. Vallée : ceux de 5 et 6 points : la ligne BAVIC (6 points sur 14 observations) récalcitrante ; AUPER (5 points, Aurec-Quimper, 02/10/54), CAMAC (6 points, Cassis-La Ferté-Macé, 07/10/54) et Southend-Pô di Gnocca (5 points, 15/10/54).

 Dans son journal de novembre 1963, J. Vallée avait ajouté : Il restera bien sûr quelques alignements exceptionnels... » (22, page 85). On verra quel sort leur sera réservé.
Quant aux structures en étoile, caractère significatif des réseaux, J. Vallée, grâce à une étude entreprise sur une base entièrement différente qu’il n’explicite pas, aurait montré qu’ils existent eux aussi mais sont, de même, le fruit du hasard. Seules deux figures de simulation sont produites dans son livre montrant à 1 et 2,5 km près avec une trentaine de points l’existence de réseaux réalisés par hasard qui ne le cèdent en rien aux réseaux les plus complexes mis en avant comme preuve de la théorie des alignements. Il semble que les calculs de Vallée convainquirent A. Michel d’abandonner sa recherche de réseaux journaliers, sauf certains demeurant cependant comme remarquables (Poncey, Montlevicq). Mais ne l’empêcha pas de les reproduire encore en 1977 !

Retour aux « matheux »
C’est dans la publication périodique du GEPA (31) « Phénomènes spatiaux » de juin 1967 que François Toulet, membre et jeune statisticien diplômé, présenta  sa mathématique de l’orthoténie. Dans l’approche du problème, on sent là le professionnel : en fait, sans l’usage de l’ordinateur et au moyen de l’analyse combinatoire, il donne la formule mathématique qui établit une limite supérieure de la probabilité pour que « » points répartis aléatoirement dans un espace « E » génère une droite de « i » points entachés d’un battement (tache) dans un couloir de surface « e ». Heureusement, il épargne aux membres du GEPA lambda les calculs intermédiaires et annonce que pour « n » respectivement égal à : 10, 20, 30, 40, 50, 100, 500, 1000 le nombre de points alignés doit être au moins de :    6, 7, 7, 5, 8, 10, 15 et 22  pour une largeur de couloir de 1 km (longueur = 838 km). 

Ce qui voudrait dire qu’à partir de 10 observations émanant de lieux placés là par hasard, on est en droit d’attendre 6 points alignés ! Froidement, F. Toulet écrit que l’application de l’orthoténie simple ne semble pas donner pour l’instant de résultats intéressants. Et  de passer à l’« orthoténie » synthétique, combinaison de cette « orthoténie » de forme (= simple) à une « orthoténie » de structure (phénomènes (cigare vertical, vaisseau-mère) et de comportement (cigare stoppé, manœuvre en feuille morte, direction du vol)  de ce qui a été vu, liés à la position de point et d’étoile : on aura une somme de petits faits, de petites coïncidences, et comme une « synthèse ». Et là, les calculs non explicités sur la base d’un alignement de 6 observations (sur 7 ou 11 ?) aboutissent  à dire qu’il n’y a qu’une chance sur 10 millions pour qu’un pareil ensemble de faits se produise ! Une marge, en effet.

Trois ans et demi plus tard, F. Toulet revenait, toujours dans les pages de Phénomènes Spatiaux (32), avec de nouvelles formules mathématiques  et une notion d’orthon, un quantum d’alignement de trois points, étendue à celle d’orthons distincts, doubles, triples…!

Le but, autant qu’il était possible d’en juger en tant que non spécialiste (un peu quand même), était de voir ainsi si le nombre d’orthons produits par une distribution d’observations ufologiques était supérieur ou inférieur à celui de la simulation aléatoire type Vallée en fonction du nombre d’observations quotidiennes.

Le test donnait des nombres « orthoténiques » :
-          supérieurs à ceux de la chance pour les alignements des 24/09/54 (BAVIC), 26/09, 29/09, 12/10, 14/10,
-          voisins pour les 27/09, 3/10, 11/10, 7/10 (Montlevic),
-          et inférieurs pour le 2/10.

Un traitement similaire était donné aux croisements (étoiles) quant à leur distribution moyenne.

On cherchait en vain une conclusion accessible et clairement formulée ; elle venait sous la forme qualitative : à lire tous ces résultats, on garde l’impression qu’il y a quelque chose et que, si une bonne partie de l’orthoténie est due au hasard, ainsi que l’a démontré l’ordinateur, néanmoins on peut chiffrer quelques probabilités très faibles. En fait, il n’en est rien !

Et d’énumérer les raisons de douter :
-          erreurs systématiques sur les mesures (points des observations),
-          caractère aléatoire pas vraiment clair ?
-          et surtout fragilité du postulat de base.
A savoir que tous les calculs avaient été faits en supposant que chaque région du territoire a une probabilité d’observation d’ovnis proportionnelle à sa surface. Ainsi, aucun effet population n’entrait dans les modèles… Ceci ne mettait pas en cause l’« orthoténie » mais la validité des calculs visant à la vérifier ou l’infirmer par rapport à une apparition par hasard ! Patatras, on en revenait au point de départ.

Le postulat de base abandonné devait-il être remplacé par un autre ? Notamment par celui appelé qualifié par F. Toulet  de tir contagieux (comparé à celui utilisé de tir indépendant) modulant la probabilité d’une observation en fonction croissante du nombre d’observations déjà enregistré dans le coin. Appliqué à l’entité territoriale département, ce test de répartition semblait faire coller les données extraites du livre de Michel Carrouges (1910-1988) : Les apparitions de Martiens (33) beaucoup mieux à la réalité qu’une répartition brute (nombre de département ayant enregistré i ovnis vs nombre d’ovnis par département). Grave problème, une même loi de contagion est connue en sociologie pour la contagion des rumeurs !

A.  Michel, dans un texte intitulé : Orthoténie : Réalités et Illusions qui suivaient celui de F. Toulet dans la revue du G.E.P.A., se disait « fatigué » en tant qu’inventeur de l’« orthoténie », s’accrochait encore aux étoiles, aux alignements exceptionnels, saluait le travail de F. Toulet qui, par le seul raisonnement démontrait la même chose que D. Menzel mais sans mettre en cause son intégrité, et se ralliait, selon l’expression de F. Toulet, à classer l’orthoténie en la tenant pour un mirage, les alignements existant bien mais étant inexplicables. C’est l’orthoténie qui n’existe pas. Et d’user du terme piège (34)  et d’une argutie éthologique pour dire qu’il peut s’agir de quelque chose d’incompréhensible, d’indéfinissable en langage humain rejoignant la notion de contact évité dans une page sublime de la fin de son ouvrage (1958). L’« orthoténie » avortée avait eu le mérite au moins de lui faire développer ce thème.

En 1971, le Dr David R. Saunders, ex membre du comité Condon, auteur d’un plaisant petit livre sur les ovnis (35) publié trois ans plus tôt où il parlait succinctement de son travail statistique sur l’« orthoténie » qui l’avait convaincu que les chances sont de façon écrasante en faveur de la réalité de l’orthoténie (36), revenait sur la question du calcul statistique autour de ce concept. Son texte, paru initialement dans la FSR (37) heureusement a été traduit en français (38). Malgré cela, il est totalement inaccessible aux non spécialistes : l’auteur veut répondre à la question : BAVIC est-il remarquable ? et, pour ce faire, il abandonne la notion de probabilité au profit de celle d’information, celle de couloir pour une définition abstraite de l’alignement et parle de la remarquabilité de BAVIC en un exposé qui… n’a pas convaincu F. Toulet, certainement le plus apte à en comprendre le raisonnement et les subtilités. C’est donc à lui que je m’en remets pour dire qu’il reconnaît le travail sérieux de son collègue américain, lequel travail, selon lui, ne démontre nullement le caractère non aléatoire de l’alignement BAVIC. Il y a bien quelque chose de non aléatoire mais ce n’est pas l’alignement !. La critique de F. Toulet porte sur le modèle de distribution aléatoire de D. Saunders qui postule que les coordonnées d’une observation X et Y sont indépendantes et oscillent selon la loi de Gauss, alors que, selon M. Carrouges, ce n’est pas le cas pour une bonne fraction de ces observations. BAVIC n’existe pas ; il n’existe qu’en tant qu’alignement non aléatoire ! J’avoue là avoir décroché depuis longtemps.


Enfin, en 1975, Jacques Scornaux, sous prétexte de possibilités de réhabilitation, voulut mettre son grain de sel franco-belge dans l’« orthoténie » ; un grain destiné à justifier une copieuse étude indigeste que INFORESPACE, organe de la SOBEPS (39) cru bon de morceler en quatre parties.

Rejetant la méthode de Mebane (topologique) comme inadaptée quand on tient compte d’un battement (distance entre le phénomène observé et le témoin), il propose d’utiliser la méthode géométrique de Menzel, dite des moindres carrés (40), améliorée par un forçage de la droite obtenue à passer par les points d’observation les mieux localisés. Pour  arriver aux mêmes conclusions à savoir :
-          qu’effectivement les simulations montrent que le nombre de droites par point est nettement inférieur à la prévision statistique (cela donne raison au ricanement de Menzel) ;
-          que les points rapprochés s’alignent plus facilement à un même battement, que les points éloignés ;
-          que l’analyse statistique fait disparaître une à une les  étoiles, celles-ci se révélant de façon surprenante entièrement expliquées par le hasard ; notamment les deux plus remarquables : Poncey-sur-Lignon  du 2 octobre et Montlevicq du 7 octobre.
-           
Finalement, J. Scornaux se lance à l’assaut (sic) de BAVIC, le dernier bastion de l’« orthoténie » sur lequel bien des statisticiens ont croisé le fer sans qu’une décision définitive soit tombée, semble-t-il, en s’interrogeant : Serait-il possible de l’expliquer par le hasard ? Ou bien est-ce bien l’expression d’une réelle étrangeté ? 

Qu’on exprime la probabilité d’occurrence d’un alignement de 6 points (ou 5 car le cas Ussel, pourtant le plus précisément situé, est éliminé pour sauvegarder le passage au sud de Vichy à moins de 4 km !) sur 14 observations dans l’espace ou dans le temps (cela revêtira une singulière signification lors des vérifications ultérieures de Jeantheau), on arrive à un chiffre très faible, voisin de 1/600 000 ! Et de commenter ce chiffre en rappelant que pour déterminer la fréquence d’un phénomène aléatoire se produisant une fois sur N, il faut un nombre d’événements supérieur à N et de loin. Il faudrait donc 1000 rapports d’observations (on s’accorde pour 500 en 1954) ou bien attendre 600 000 jours [16 siècles ! (41)] pour pouvoir trancher la question : Y a-t-il « autre chose » derrière la simple réalisation d’un événement très improbable mais non impossible ? Théoriquement, selon les lois de Gauss, rien n’interdit à un fait très improbable de se produire immédiatement mais il faut effectivement très longtemps pour le revoir apparaître. Un truisme  largement à la portée de tout non statisticien.

La déception ne vient donc pas seulement des études de statistiques  et l’« orthoténie » apparaîtrait en fin de compte comme une fausse piste, un piège, selon le terme de A. Michel. La valeur scientifique de l’« orthoténie » aurait été négligeable mais son mérite historique grand dans le sens qu’elle a permis de prendre au sérieux les atterrissages et les rencontres rapprochées avec humanoïdes ?

Est-ce un bien ou un mal quand on mesure aujourd’hui l’état de déliquescence de l’ufologie ? Mais l’ « orthoténie », en 1975, n’avait pas encore subi l’assaut qui allait lui faire le plus mal : le passage à la moulinette des sceptiques socio-psychologues.

L’attaque des sceptiques
En 1977/79, parurent plusieurs ouvrages écrits par des ufologues repentis, honteux de leur  crédulité alors qu’ils appartenaient à un groupe. On sait que ce genre d’approche génère les pires debunkers qui soient : ceux-ci tentèrent ni plus ni moins à réduire la vague de 1954 à rien d’autre qu’une vaste rumeur, une psychose généralisée où se mêlent indistinctement les confusions de « bonne foi », les interprétations hâtives, les embellissements des rapporteurs, des voisins, les gros canulars et les grosses farces sans compter les arrangements journalistiques (42).  Cette approche socio-psychologique de la problématique ovni qui nie toute étrangeté au phénomène, privilégiant exclusivement le plaquage de fantasmes socioculturels sur quelque chose de banal non reconnu, a enfanté une école ufologique bien représentée en France bien que non structurée (43).

L’« orthoténie », bien sûr, fut immanquablement la victime collatérale de ces tirs de démolition. Au cours de contre-enquêtes effectuées 20 ans avant les faits, MM. Barthel et Brucker auraient démontré de nombreuses confusions, des plaisanteries, des farces, voire des inventions. Et pas des moindres : Prémanon, Quarouble n’y aurait pas résisté. Ainsi, pour la ligne BAVIC, A. Michel aurait été victime d’erreurs glissées dans ses données… Les 6 points de BAVIC sont ainsi réduits à 3 !

Michel Monnerie (44), premier socio-psychologue français, soulignait qu’ainsi les cas sérieux s’alignaient avec les canulars et n’y voyait rien de surnaturel sinon que l’« orthoténie » n’était qu’une illusion.

Par ailleurs, un problème de dates se faisait déjà jour, crucial pour la notion d’orthoténie quotidienne. Que A. Michel ait pu, en 1977, n’en faire aucun état dans sa postface 20 ans après [réédition de son MOC  (3c)] et n’en pas avertir ses lecteurs, relève pour moi d’une certaine désinvolture que je m’explique mal(45). Car, si déjà à cette époque en matière « orthoténique », la messe était dite, il ne restait plus qu’à en formuler le requiem !

Le coup de grâce des années 1990
Il fut magistralement asséné en 1997 par Michel Jeantheau (46) dans un chapitre du livre de Jean Sider sur le dossier 1954 (47).

M. Jeantheau y relate comment son recensement de tous les articles de presse  concernant la vague ovni de 1954 à la Bibliothèque Nationale, à laquelle il eut accès jusqu’en 1991, aboutit à une révélation ahurissante.  Sous le titre : Que devient BAVIC ?, il raconte comment, à partir des observations ovnis annoncées pour le 24 septembre par A. Michel, il a retrouvé ses sources spécifiées dans son livre MOC (essentiellement le Parisien Libéré du 27 septembre et Paris Presse du 28). Ces deux journaux que A. Michel lança à la figure de D. Menzel pour faire taire son vilain défaut de polémiste arguant du fait que toutes les insinuations d’invention, de localisation à posteriori, étaient une insulte à son honnêteté (voir son article dans la FSR intitulé : Réflexions d’un honnête menteur in FSR mai/juin 1965).

Or, que constate M. Jeantheau : tout d’abord que, dans ces deux articles, ne figurent pas les données complètes pour construire la ligne BAVIC. Loin s’en faut ! En cas d’incertitude pour la date figurant dans ces articles de presse (pour  5 cas sur 6, rien moins), M. Jeantheau recherche si l’incident ufologique n’a pas été rapporté ailleurs, ce qui éventuellement permettrait d’un préciser la date. Et le résultat est accablant pour la ligne « orthoténique » BAVIC et son découvreur ! Par des recoupements, il s’avère que Bayonne date du 23 septembre (voire du 22), Lencouaq du 23, Tulle du 22, Ussel du 20, Gelles du 17 (!), et Vichy du 24 ou 23 ! Les observations figurées dans la ligne « BAVIC » correspondent à 5 dates différentes. Comment A. Michel a-t-il pu ainsi assigner ces dates erronées ?  On se perd en conjectures. BAVIC sombre dans le néant, écrit M. Jeantheau et, comme pour étayer la remarque que la façon de A. Michel manquait pour le moins de rigueur, il recherche les dates des 3 autres observations du jour dont une seule paraît être du 24. Sur 9 observations, seulement 2 sont du 24 septembre !

Quant aux cinq autres observations rajoutées à ce même jour par J. Vallée, il en trouve 3 douteuses quant à la date et une (Vierzon) bien du 24 mais placée dans l’alignement du 23 par A. Michel ! N’importe quoi !

Heureusement, A. Michel n’est plus là pour subir cet hallali « orthoténique » sans appel. M. Jeantheau a-t-il différé sa révélation justement pour épargner les vieux jours du pape de l’ufologie française ?

Dans un souci de démonstration bien légitime, M. Jeantheau présente SA carte ufologique de la journée du 24 septembre 1954 (11 points) et n’y voit aucune particularité de remarquable ; or, en surimpression à cette carte publiée dans 46-47/, je me suis permis de rajouter 2 alignements : un de 4 et un de 3 !
Décidément l’illusion « orthoténique » est tenace, n’est-ce pas ?

A. Michel au banc des accusés ?
A un tel niveau d’inexistence de BAVIC, le dernier  fleuron de l’orthoténie (39) quotidienne, on est tout de même autorisé à s’interroger sur les méthodes de sélection et de traitement des données par A. Michel (un ami me suggère qu’il n’avait justement aucune !). Et ce, tout en respectant sa mémoire.

Comment a-t-il pu à ce point se tromper ? Comment a-t-il pu se prêter à ce mirage ? Comment a-t-il pu ainsi être fasciné par quelque chose qu’il savait frelaté, être la victime – inconsciente ou un brin consentante ? - du maléfice « orthoténique » journalier pour la vague de 1954 ? Avec le recul et avec ce qu’on a appris, il apparaît responsable de quelque chose qui s’accorde mal avec le caractère d’intégrité qui ressort de ses livres et qu’on lui prête. Il n’empêche qu’il soulignait dès 1966 que cela  ressemblait à un jeu d’enfant. Mais pourquoi continua-t-il à jouer avec ses lecteurs jusqu’en 1977 (voir note rajoutée en 2016) ?

L’ufologue J. Giraud avait une thèse qui amusa beaucoup M. Monnerie. Il s’émerveillait (Monnerie dixit) du fait que les erreurs aillent toutes dans le même sens pour permettre à A. Michel de découvrir l’orthoténie en 1957  et à lui de s’interroger en 1976. Il en déduisait, toujours selon M. Monnerie, que tout cela était manigancé « d’en haut » et que les farceurs étaient « poussés » à faire un faux qui s’alignerait avec d’autres, faux ou authentiques, afin que A. Michel puisse faire sa découverte et qu’elle s’autodétruise quelques années plus tard. Comme le clin d’œil d’un dieu qui ne voudrait pas laisser de trace !
Bien que cette thèse ne soit pas pour moi sujet de raillerie (c’est la thèse du filou [trickster en anglais] qui en d’autres circonstances me plaît bien), je voudrais revenir sur les écrits de A. Michel qui pourraient accréditer l’idée qu’il y avait anguille sous roche et qu’il est difficile de croire que cette fabrication se soit faite à son insu.

On peut lire dans la version anglaise de MOC (7), page 111 : la seule liberté que j’ai prise avec les rapports de journaux, est celle de la détermination des dates, les ajoutant quand elles manquent, les changeant quand elles sont fausses. Or ce passage est supprimé de la version française ! Au profit de la formule : Tout ce qu’on pourra me reprocher, c’est d’avoir recherché les dates exactes, quand elles étaient erronées ou insuffisamment précisées dans les journaux. La nuance est de taille quand on sait que les dates assignées par A. Michel étaient fausses et ont servi, en cette occurrence à bâtir le ligne BAVIC. Ces propos étaient inclus dans le paragraphe intitulé en français : La parole est aux savants, traduit (librement ?) par A. Mebane par Les savants doivent faire un choix.

Paraphrasant J. Vallée, ce sont ces libertés prises avec les dates par A. Michel qui ont été largement négligées quant à leur incidence sur certains alignements.

A la décharge de A. Michel pour tenter d’alléger sa lourde responsabilité dans ces dates placées opportunément à l’appui de sa thèse « orthoténique » quotidienne, je n’ai trouvé que deux arguments :

1/la visite de J. A. Hynek venu, en 1959, le voir à Paris pour vérifier les journaux (sic) où il avait puisé ses données ; qu’en ces deux jours de discussion, ils n’aient pas mis en évidence les graves lacunes de dates, au moins pour celles manquantes, est très regrettable ; au point de lui faire partager quelque peu l’illusion « orthoténique » avec ces illustres visiteurs (Hynek, Guérin…) ? Pourquoi pas ?
2/ A. Michel a-t-il pu être la victime de la science-fiction ?

A. Michel influencé par la SF ?
Une suggestion certes surprenante : A. Michel fut-il la victime innocente (?) d’un concept pernicieux défendu par un de ses plus grands disciples du moment (48) ; projeta-t-il sur ses cartes ponctuées des lieux d’observation journaliers, dont certaines venaient impertinemment se placer sur des lignes droites, les réminiscences de science fiction ? Menzel raconte qu’en visite à Paris, il trouva dans la caisse d’un bouquiniste de bord de Seine à Paris une copie du livre de Pierre Devaux (1901-196 ?) intitulé L’exilé de l’Espace aventure dans le système solaire » (49) où l’idée de l’« orthoténie » était déjà décrite en 1948 ? Il est intéressant de spéculer que Michel peut avoir lu ce livre et fut de ce fait entraîné à développer l’hypothèse orthoténique. Ou alors, c’est une remarquable coïncidence » (25). Mais la plus grande coïncidence n’est-elle pas de voir Menzel tomber par hasard sur ce livre lors d’un séjour à Paris ?

Je me suis procuré ce livre et l’ai lu avec quelque intérêt (modéré) : il raconte les aventures vécues par les membres d’une expédition en fusée sur Vénus partie à la recherche… du secret révélé par Vercingétorix vaincu à César ! A savoir que les Ancêtres du chef des Gaulois ont pu, grâce aux ultra-sons, se rendre sur Vénus…

Une planète Vénus colonisée à la fin du 20ème siècle (P. Devaux date les faits de 19…) et qui est décrite couverte de fougères géantes et de Fleurs-Estomacs, habitée de sauriens identiques à ceux vivant sur Terre au secondaire : Mégalosaures et Hommes-Crocodiles. Les aventures dans le système solaire consistent à retrouver la Roma Veneris  (apparemment les Romains ont exploité le secret) et le descendant du Grand-Prêtre : Paulus Maximus.

Mais l’orthoténie dans tout ça ?

Au chapitre indiqué par Menzel, on trouve brièvement l’exposé d’une toile d’araignée constituée par des villes portant les noms plus ou moins déformés d’alésias, des lignes voulues divergeant en une gigantesque étoile européenne autour de ce point précis et dont l’exploitation va permettre de désigner Vénus. Sincèrement, A. Michel aurait-il pu être inspiré même inconsciemment par ce bref passage (50) qui, en aucune façon, ne constitue ce que Menzel qualifie de remarquable description d’un phénomène similaire à l’orthoténie ?

Compte tenu de sa brièveté, d’ailleurs presque traduit in extenso par Menzel, qui ne constitue nullement un temps fort du livre, je vois plutôt dans ce dernier coup de patte de Menzel à Michel autre chose là aussi … que le hasard.

Certes, il a été prédominant dans l’histoire de l’« orthoténie » : hasard de l’attribution inconsciente (?) d’une même date aux observations BAVIC, hasard facétieux produisant des dates, mais j’ai du mal à gober le hasard comme provocateur de la trouvaille du livre de P. Devaux par D. Menzel en visite à Paris ! Menzel écrivait qu’il était intéressant de spéculer que Michel pouvait avoir lu ce livre et fut ainsi entraîné à développer l’hypothèse « orthoténique ». Moi, je crois qu’il est aussi intéressant de spéculer que Menzel avait été avisé de cette coïncidence par un Français (ufologue ou non) et qu’il décochait là un dernier coup de pied rancunier à celui qui avait osé le défier publiquement et marquer des points contre son grand parti pris.

Orthoténie en l’an 2000
J. Clark écrit que pour la plupart des ufologues, l’orthoténie a été une impasse …  Mais que de temps en temps quelques avocats déterminés tentent de la faire revivre.

Dernier en date, en 2000/2003, dans les pages de l’International UFO Reporter fondé par Hynek et édité par J. Clark, Ebehart et Rodeghier, Don Johnson voulut « revisiter » l’« orthoténie ». Ce conseiller en informatique du New Hampshire était le responsable de la base de données UFOCAT et se proposait de produire une nouvelle évidence pour ressusciter l’« orthoténie » dormante. Ayant l’outil pour exploiter avec les logiciels informatiques Microsoft et disposant de 1116 rapports d’observations concernant la vague française de 1954, il revisite les alignements BAVIC, CAMAC et AUPER et peut lancer une linéarisation générale des observations de la vague ; c’est ainsi qu’il découvre un véritable feu d’artifice se croisant sur Vauriat (51), dans le Puy de Dôme. Il trouve que 73 observations de la vague (52) se placent sur BAVIC, 68 sur CAMAC, 70 sur AUPER . BAVIC passe même par le village du contacté brésilien Antonio Vilas Boas ! CAMAC par Rome, AUPER  par la Mecque et une autre ligne par Lhassa…

Pour lui, il ne fait aucun doute que derrière ces lignes (il parle de réseau= grid) un système de navigation » peut-être symptomatique d’un système de propulsion et une intelligence attachée aux ovnis qui s’intéresse aux affaires politiques et religieuses humaines.

C’est l’ufologue français Claude Maugé (53) tendance « socio-psychologisante » qui monta au créneau pour tempérer l’enthousiasme de cet « orthoténiste » de la dernière heure. Il voulut apporter quelques corrections aux propos de D. Johnson, notamment en arguant du fait que la ligne BAVIC n’existe pas en tant que ligne « orthoténique » puisque la date des observations n’est pas la même ; à moins de modifier la base de 24 h instaurée par A. Michel mais cela requiert un mode totalement nouveau d’orthoténie : précisément celui que D. Johnson préconisait. Plus pertinente, la remarque de savoir ce que Johnson entendait par cas UFO de haute qualité qu’il aurait privilégié dans son étude ; C. Maugé rappelait que la plupart des cas de 1954 n’ont pas été enquêtés à l’époque et, à mon sens, n’insistait pas assez sur les canulars dénoncés à posteriori dont on ne sait si D. Johnson en avait purgé son fichier. Et de s’interroger si un mathématicien n’a jamais étudié l’orthoténie ? Je pense avoir montré ci-dessus que quand même on peut répondre que oui. Quant à dire que l’orthoténie a été totalement abandonnée par les ufologues français, je trouve cela quelque peu excessif. Car, comme j’ai pu le constater sur le terrain auprès des ufologues de base d’une petite association locale à laquelle j’appartiens, cette affirmation n’est pas tout à fait vraie. Quelle le soit dans l’élite ufologique socio-psychologique, je n’en doute pas mais cette école est encore loin de représenter l’ufologie française. Dans chaque ufologue français dort un « orthoténiste » en manque, même si on peut le déplorer. Si ça peut consoler les mânes de A. Michel !

Conclusion
Que reste-il de l’« orthoténie » ? Rien sinon un « grand espoir déçu » (Scornaux), une frustration. Déjà en 1966, A. Michel admettait que l’ « orthoténie » devait être considérée comme une péripétie sans lendemain.
Qu’une telle débauche de calculs ait contribué à banaliser une fabrication de l’esprit (type « pareidolia ») est aussi réellement remarquable.

Après avoir évoqué pour expliquer l’« orthoténie » un produit de l’imagination de A. Michel, D. R. Saunders, en 1968 (n’avait-il pas encore effectué ses calcul ?), écrivait que la dernière explication raisonnable de la vague de 1954 en France était le produit d’une conspiration inspirée par les Soviétiques avec tous les rapports d’observations préfabriqués à Moscou pour distribution à des témoins complices aux endroits et aux moments appropriés.

Plus sérieusement, il ne reste rien de l’« orthoténie » journalière telle que définie par A. Michel.

Mais qu’en est-il de l’« orthoténie » généralisée à une vague entière telle qu’appliquée ci-dessus par Don Johnson et beaucoup plus tôt par J. Vallée ? A partir de calculs faciles aujourd’hui grâce à l’informatique sur les bases des formules de Menzel, on sait que le hasard doit aligner (au même battement près) plus de 12 000 lignes de 30 points (!) et donner une chance sur 4 d’en faire apparaître une de 40 pour 1000 observations et 15 lignes de 20 points à partir d’un nombre d’observations de 500, tout cela selon les lois inéluctables du hasard ; et on se dit, dès lors, que quiconque osera se replonger sur le mystère de l’« orthoténie » par vague risque bien de s’y illusionner à nouveau surtout si, comme D. Johnson, il admet comme meilleur test statistique celui de l’inspection visuelle

Les tenants de la théorie des alignements ont été les victimes de phénomènes de « pattern – recognition », des phénomènes subjectifs, a-t-on pu lire (29). Comme celui de voir dans des pointillés des lignes ayant donné lieu aux fameuses théories sur les canaux martiens. Hélas nul ufologue, fût-il scientifique, n’est à l’abri d’une telle création fantaisiste de l’imagination dont le Science garde maints stigmates. Gardons-nous seulement de l’alimenter, voire de la fabriquer. Pour le reste…


Notes et références :
1/ Aimé Michel, Lueurs sur les Soucoupes Volantes, Mame Editeur, coll. « Découvertes », Paris, printemps 1954. Paru, donc avant le début de la fameuse vague française d’ovnis. L’auteur avait publié en 1953 un premier ouvrage sur l’histoire de l’alpinisme !

2/ « Orthoténie », tiré de l’adjectif grec « ορθοτενής »  = orthoteneis, signifiant « tendu en ligne droite ».

3/ Aimé Michel, À propos des soucoupes volantes - Mystérieux objets célestes (MOC), a- éd. Arthaud, 1958, coll. « Clefs de l'Aventure/Clefs du Savoir » ;  b- Editions Planète, 1966, réédition avec nouvelle préface ; c- Editions Laffont/Seghers, 1977, réédition sans la nouvelle préface de 1966 mais avec une conclusion intitulée : vingt ans après.

 

 4/ Jerome Clark, The UFO Encyclopedia, Omnigraphics Inc. Detroit, MI, 1998 : 1128 pages grand format.

5/ Claude Maugé, UFO Statistics, in « UFOs 1947-1987 », Fortean Tomes, Londres, 1987.

6/ Selon lui (7), ce premier livre ne fut guère remarqué du public. Il fut quand même, reconnaît-il, lu par tous ceux qui, en France s’intéressaient aux ovnis et, ils étaient nombreux. Notamment Pierre Guérin qui devint ami d’A. Michel et lui permit de rencontrer à Paris (une première fois) en 1959 Josef Allen Hynek (1910-1986) et de s’intéresser à Jacques Vallée. C’est ce premier livre qui lui avait aussi ouvert les pages du mensuel Science & Vie où il exposa pour la première fois en français, début 1958, sa trouvaille « orthoténique ». A noter que, dans la revue américaine grand public FATE de décembre 1957, où A. Michel relatait pour la première fois l’incident de Poncey-sur-Lignon (4 octobre 1954), déjà des problèmes de dates se posaient pour 2 observations qu’il avait incluses dans la journée du 4 alors qu’elles avaient eu lieu le 3 (Abbéville et Bergerac). Il écrit que l’article de FATE fut écrit vers la fin de 1956 à une époque où seul un cas particulier d’orthoténie lui était apparu clairement : celui du 3 octobre Albain-Pommiers dont il rapportait les 5 points d’observation à une ligne droite occasionnellement parcourue par un avion. En tout cas, le terme d’  « orthoténie » n’apparaissait pas encore dans l’article de FATE.

 7/ Aimé Michel, Flying Saucer and the Straight-Line Mystery, Criterion Books, New York, 1958. Criterion Books avait publié le premier livre sur les ovnis de A. Michel sous le titre : The Truth about Flying Saucers.

8/ Alexander D. Mebane appartenait à la division recherche de la Civilian Saucer Intelligence, association ufologique de New York.

9/ Soucoupes volantes : l’étrange découverte d’Aimé Michel, Science & Vie n°485, février 1958 ; photo de A. Michel et Philippe Cousin, rédacteur en chef du mensuel.

10/ Aimé Michel,Oui, il y a bien un problème Soucoupes Volantes !  La découverte des alignements, in Planète, n°10, mai/juin 1963.



11/ceux-là même qu’il excluait d’une méthode scientifique pour la vague de 1954, un dossier monstrueux, dont le nombre de témoignages et leur concordance créent à la longue une sensation de malaise » (3a).

12/ En fait, il s’agissait de voir si les ovnis ne suivaient pas les lignes géomagnétiques terrestres.
13/ Comme le fait remarquer judicieusement J. Scornaux, la notion de ligne droite n’existe pas dans la nature ; « elle est une création de l’esprit humain » ; en tout cas, elle n’est pas utilisée même par les avions ; les Airbus de lignes actuellement visualisent le trajet de l’avion pour les passagers sur leur écran de dos de siège et on voit ainsi que la courbe est la trajectoire naturelle des avions.

14/ René Fouéré, Phénomènes Spatiaux, n°12, juin 1967.

15/ J. Vallée y inaugurait une orthoténie non quotidienne alignant 5 points d’observation de Tenes à Souk-Ahras à partir de 56 observations enregistrées entre 1942 et 1957.

16/ La Flying Saucer Review existe encore aujourd’hui mais ne fait hélas plus référence. Dans le numéro de mars/avril 1964 où D. Menzel attaquait l’« orthoténie » de Michel, on apprenait qu’un argument contre l’« orthoténie » avait été apportée par l’auteur de SF américain I. Asimov qui avait avancé qu’on aurait pu obtenir les mêmes résultats en sélectionnant les villes et les villages des Etats-Unis.

17/ Paul Misraki, Des signes dans le ciel , Editions Robert Laffont, 1978. Dans cette réédition de son livre paru initialement en 1962, le parolier de chansons parlait de l’ « orthoténie » comme conservant un caractère des plus impressionnants pour être la première preuve scientifique de la réalité des ovnis.

18/ Rémy Chauvin, en 1983, n’hésitait pas à inclure à ses références La Ligne BAVIC pour son livre de Science et Fiction : Voyage Outre-Terre, publié aux Editions du Rocher.

19/ Aimé Michel, Palaeolithic UFO-Shapes, in Flying Saucer Review, 15, 6, November-December 1969. En fait, il s’agissait  de montrer que la ligne BAVIC traversait certains lieux préhistoriques dont les cavernes avaient révélé des dessins paléolithiques contenant des dessins d’ovnis !

20/ BAVIC passe par Chalon-sur-Saône !

21/ Aimé Michel, Global Orthoteny : Aime Michel’s latest discovery in Flying Saucer Review, 9,3, May/June 1963.

22/Jacques Vallée, Science Interdite, Journal 1957-1969, O. P. Editions, 1997.

23/ Donc bien avant les insinuations de Menzel.

24/ A. Michel, en 1977, écrit que le rapport de Menzel est truffé d’équations mathématiques alors qu’il n’en contient que deux !

25/ Donald H. Menzel, UFO’s – The Modern Myth, Chapitre 6, Appendix 5 : Do Flying Saucers move in straight lines ?, in UFO’s A Scientific Debate, edited by Carl Sagan and Thornton Page, Cornell University Press, Ithaca, 1972.
Dans son livre publié en 1977 : The UFO enigma. The definitive explication of the UFO phenomenon (Doubleday & Company, Inc. New York), D. H. Menzel ne disait pas un mot ni de A. Michel, ni de l’« orthothénie ». Il prétendait que les soucoupes volantes s’expliquaient facilement comme des illusions provoquées par des phénomènes météorologiques et optiques.


26/ Depuis les années 1985, A. Michel a essuyé des accusations autrement graves que celles de Menzel : manipulation de ses sources peut-être involontaires (?), suppression de certaines explications triviales rapportées dans ces sources, réarrangement des dates, trafic de l’individualité des cas, etc.

27/ J. Vallée, par un tirage de nombre aléatoires, ce en quoi excelle un ordinateur, fait placer des points au hasard sur une forme stylisée du territoire français. Puis il joint les points ainsi placés pour voir s’ils sont en ligne droite. Aujourd’hui les logiciels Microsoft permettent très facilement cette opération.

28/ J’ai personnellement eu recours à cette technique à Montréal en 1968/69 pour des calculs d’orbitales moléculaires dans le cadre de l’obtention de mon doctorat en chimie.

29/ Jacques Vallée et Janine Vallée, « Les phénomènes insolites de l’espace ; Le dossier des mystérieux objets célestes », Editions de La Table Ronde, Collection L’ordre du Jour, 1966.

30/J. Vallée donna des cours de programmation informatique à J. A. Hynek !

31/ G.E.P.A., « Groupement d’Etudes de Phénomènes Aériens et d’Objets Spatiaux Insolites », hélas disparu. Avant fin 2008, sortira une réimpression de l’intégralité des numéros de la revue sous la direction de la veuve de René Fouéré, Francine, une grande amie à moi.

32/ Numéro 26, décembre 1970.

33/ Michel Carrouges, « Les apparitions de Martiens », Editions Le Grand Damier, 1956.

34/ Ce « piège » dans lequel il était tombé nécessitait da sa part cette mise au point qu’il en avait parlé dans le sens « de ce qui marche pour 1954 et est illusoire pour les autres vagues » (Phénomènes spatiaux, juin 1967). Pathétique : y avait-il encore quelque chose à sauver ?

35/ David R. Saunders & R. Roger Harkins, « UFOs ? Yes ! », Signet Books, 1968.

36/ Le raisonnement supportant cette conclusion selon D. R. Saunders était compliqué et il en réservait la primeur au Dr Edward U. Condon (1902-1974) pour lui donner l’opportunité de l’inclure dans le rapport final de L’Université du Colorado, ce qui ne fut pas fait, bien entendu. Le rapport Condon consacre deux pages à l’« orthoténie » traitant son auteur A. Michel de journaliste français qui a étudié et écrit sur les croyants aux ovnis. Parlant de la ligne BAVIC, il la date du 24 septembre 1944 !! Le bien-fondé du concept y est bien entendu mis en question.
En fait, la méthode de D. Saunders, selon (38) est classique comme dérivée de la méthode statistique prenant en compte la somme des carrés des distances et un changement de coordonnées passant comme origine par le barycentre des points considérés. Usant du langage FORTRAN, il s’agit d’un calcul de rapport de variances pour les degrés de liberté spécifiés se référant aux tables de Pearson et au poids de la présomption en faveur d’une explication ne reposant pas sur le hasard ; bref que bonheur pour un statisticien et d’un grand hermétisme pour les autres.

37/ D. R. Saunders, Is BAVIC remarquable ? in « Flying Saucer Review », 17, 4, july/august 1971.

38/ Phénomènes spatiaux, n°31, mars 1972.

39/ La défunte Société Belge d’Etudes des Phénomènes Spatiaux (SOBEPS) qui publiait sa revue tous les deux mois. L’intervention de J. Scornaux intitulé : L’orthoténie : un grand espoir déçu ? parut dans les numéros 23 à 27 d’octobre 1975 à mai 1976.

40/ À noter que cette méthode est devenue d’une banalité affligeante depuis l’existence de sa fonction incorporée au logiciel informatique Excel de Microsoft. Par curiosité, j’ai comparé le résultat de BAVIC avec les coordonnées indiquées par Vallée (29) et celles tirées de IGN : coefficient de corrélation de 1,0000 et   0,9994 respectivement, ce qui paraît tout de même miraculeux !!

41/ Bien au-delà de la date où les voyages interplanétaires sont sensés nous permettre de vérifier in situ la nature extraterrestre des MOC en allant rencontrer leurs expéditeurs ! J. Vallée chiffrait cela à 10 ou 20 ans ! En 2008, 100 ou 200 ans serait plus raisonnable ; en tout cas bien avant la réapparition d’un alignement style BAVIC.

42/ Gérard Barthel et Jacques Brucker, « La Grande peur Martienne », Nouvelles Editions Rationnalistes, 1979.

43/ Le rôle de porte-parole de cette école fut un temps assumé par Pierre Lagrange au grand dam des ufologues traditionnels qui lui collent encore au dos cette étiquette. Il semble avoir abandonné cette théorie au profit de quelque chose qui varie selon le type de média qui l’accueille. La socio-psychologie des ovnis est représentée Outre Manche par la revue MAGONIA éditée par John Rimmer dont on nous a annoncé la disparition pour fin 2008. Il est vrai que cette facette de l’ufologie actuelle n’a rien pour séduire.

44/ Michel Monnerie, Le naufrage des extra-terrestres, Nouvelles Editions Rationnalistes, 1979. Auteur aussi de Et si les ovnis n’existaient pas ?, Les Humanoïdes Associés, 1977.

45/ Notamment, qu’honnêtement l’auteur n’ait pas reconnu que 81 % des alignements (ceux de 3 et 4 points) reproduits encore dans la version de 1977 de MOC peuvent être expliqués par le hasard est plutôt étonnant pour ne pas dire décevant !

46/ En fait, il semble que sa découverte date de 20 ans plus tôt, mais les éditeurs lui refusèrent la publication d’un livre qu’il dut sortir à compte d’auteur et qui passa inaperçu d’autant plus à cause de son titre : Michel Jeantheau, Le Rayonnement, La pensée Universelle, 1988.

47/ Jean Sider, Le dossier 1954 et l’imposture rationaliste, Editions Ramuel, 1997.

48/ B. Meheust, auteur de Science-fiction et Soucoupes volantes publié en 1978 par Mercure de France et réédité récemment en 2008. MM. Michel et Méheust échangèrent  dans les années 1970, ce qui n’empêche pas A. Michel d’écorcher son nom en Méhust au chapitre excédentaire intitulé : 20 ans après, dans la réédition Seghers de MOC (3c).

49/ Pierre Devaux, L’Exilé de l’Espace, Collection « Science et aventures », Editions Magnard, 1948.
50/ Pourquoi pas aussi par le dessin de J. Bergier sur une nappe de restaurant pour les étoiles ?

51/ Le Vauriat, signalé malicieusement sur BAVIC par J. Bergier pour l’embarrasser, tomba, au contraire, à pic dans son élaboration d’une « orthoténie » dite globale en 1963 qu’il exposa dans la FSR. Grâce à D. Saunders, ce petit village du Puy-de-Dôme fit figure de nombril ufologique de la vague d’ovni de 1954 (point d’intersection des lignes BAVICCAMAC et AUPER). Le 29 août 1962, il fut le théâtre d’une observation d’ovni particulièrement bonne (Johnson, 2000).

52/ Saunders, grâce à la même base de donnée UFOCAT (basée sur les coordonnées Michelin) qui contenait, en 1970, 500 observations sur la vague de 1954  en trouvait 70. Pour lui, BAVIC contenait 5 % de tous les rapports de la vague de 1954.

53/ Claude Maugé est un ami à moi avec lequel je corresponds depuis plus de 10 ans. Malgré nos vues divergentes sur l’origine des ovnis, j’ai toujours grand plaisir à échanger avec lui sur le sujet car, contrairement à ce que je croyais, sa thèse n’est pas une négation du phénomène, lequel débarrassé de ses oripeaux trompeurs socio-psychologiques en sortirait, pour ce qu’il en reste, transfiguré.

Publié dans UFOMANIA Magazine n°57, novembre-décembre 2008.


Note de 2016 :
Je sais que cette mise en cause des travaux d’Aimé Michel ne plaît pas à certains de ses inconditionnels dont on se demande bien pourquoi ils veulent à tout prix exonérer le maître de l’ufologie française de ses responsabilités ; mais ce n’est pas tant ce qui s’apparente bien à un « trafic de données » (terme que j’ai osé utiliser) pour asseoir une théorie fumeuse (elle nous fascina à l’époque) qui me choque mais le fait que Michel n’ai jamais pris la peine d’avertir ses lecteurs qu’il s’était trompé. Notamment dans l’édition de 1977 de son livre où il évacuait brièvement les accusations de Menzel selon lesquelles, « il aurait inventé ou découvert après coup » ses observations les plus probantes

C’est quand même le minimum de l’intégrité de reconnaître qu’on s’est trompé ou plutôt qu’on a profité de certaines incertitudes pour laisser libre cours à une débauche d’imagination, entraînant une cohorte de fans à s’illusionner au point d’imprimer cette idée fausse dans l’inconscient collectif des ufologues. Il est vrai que je connais peu de philosophes qui viennent ainsi battre leur coulpe pour d’autres théories ufologiques tout aussi illusoires.





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