Que s’est-il passé
le 5 novembre 1990 ?
« La vague
d’ovni la plus colossale connue en France à ce jour », selon
certain. « Une rentrée atmosphérique du satellite qui explique 95 %
des observations au moins », d’après un autre !
En tout cas, les
témoins se sont comptés par milliers. Et cette affaire n’a jamais généré un
épilogue consensuel.
Deux ufologues français, chacun de leur côté et à 6 ans
d’intervalle, y ont consacré un petit ouvrage ; ils personnalisent les
deux extrêmes qui s’opposent pour donner une interprétation de ce qu’on a pu
voir dans le ciel clair, en ce lundi 5 novembre 1990, à 19 heures tapant. L’un,
Didier, est responsable de la publication du bulletin UFOMANIA Magazine ;
l’autre Robert, faisait partie de l’association marseillaise du CERPA
(Centre d’Etudes et de Recherches sur les
Phénomènes Aérospatiaux). Cette association a malheureusement disparu
depuis plusieurs années de la scène ufologique et je ne sais pas ce qu’elle est
devenue. Tous les deux manifestent la même sincérité, la même rigueur, pour
défendre leurs convictions par rapport à ce qui s’est passé. Ces deux opinions
opposées méritent respect et considération puisqu'elles cherchent à discerner
la vérité.
Selon Didier, c’est une « fâcheuse
coïncidence » que cette apparition quasi simultanée entre d’authentiques
phénomènes de type ovni et une rentrée satellitaire. Pour Robert, c’est une
grave atteinte à la crédibilité du témoignage humain qu’apporte cette mémorable
nuit où de nombreux témoins ont confondu une désintégration spatiale à 100 km d’altitude avec une
flottille d’ovnis volant bas. Deux avis divergents qui finalement se rejoignent
à la manière du verre à moitié vide et du verre à moitié plein.
Ni l’un ni l’autre ne conteste qu’en cette soirée, voilà
11 ans, par une nuit étoilée, sans lune, la France fut traversée d’Ouest en Est, de Bordeaux
à Strasbourg, par « des masses lumineuses immenses et silencieuses »
laissées par le frottement dans l’atmosphère des débris spatiaux de
désintégration du 3ème étage
d’une fusée Proton soviétique, constituant un spectacle inoubliable pour tous
ceux qui y assistèrent. Là où ils sont en désaccord, c’est sur un tout petit
nombre de témoignages (l’écume de la vague Robert dixit) qui peuvent être
interprétés soit comme une manifestation extraterrestre en action de camouflage
(Robert), soit comme une « interférence d’une autre nature »
(Didier). Car, c’est là où réside tout le sel de la confrontation de ces deux
approches : Robert, « le debunker » croit certainement beaucoup
plus à l’hypothèse extraterrestre comme cause des ovnis que Didier (le croyant)
qui y voit « autre chose de radicalement différent et de bien plus
complexe ». C’est la « cohérence globale » du phénomène qui
incite Didier à discerner une « manifestation intelligente » tandis
que Robert envisage, du bout des lèvres, que cette « rentrée », en
avance sur les prévisions de la
NASA et vraiment trop bien orientée, pourrait provenir du
fait que « les ET lui auraient donné un coup de pouce pour que l’étage de
la fusée traverse par le milieu un pays entier à l’heure où il peut être
observé dans les meilleures conditions par un maximum de témoins » !
Chacun argumente pour étayer sa thèse, mais là aussi il y
a contraste entre la mesure de Didier qui ne retient que 9 témoignages somme
toute pas si extraordinaires que ça : notamment les lumières qui
réagissent à l’appel de phare d’une mobylette deux jours avant le 5 novembre,
un triangle style « plate-forme » belge dont les phares éclairent le
sol et un objet qui, entre 19 h et 19 h 15, survole un témoin près d’Evreux et
soudain « change de direction en accusant un virage de 90 degrés dans le
sens des aiguilles d’une montre laissant entrevoir une des deux faces ».
Et Robert qui va jusqu'à la mauvaise foi en arguant du fait que le bruit de
ventilateur rapporté par un témoin qui l’a rendu sourd est « une
impression de surdité provoquée par l’absence incompréhensible de
bruit » !
Didier profite de son petit livre pour nous exposer sa
réflexion sur la possible nature du phénomène ovni. Il écrit que les ovnis ne
semblent exister que par rapport à nous, ce qui me paraît fort juste puisque
nous en sommes les observateurs. Il s’agirait, à son sens, d’une manifestation
d’une certaine forme d’intelligence, une structure vivante qui surveille notre
monde depuis des siècles et des siècles en le dirigeant à sa guise sous forme
d’apparitions qui évoluent suivant les populations, les lieux, les époques.
« Une Supra-Intelligence, une prodigieuse puissance de manipulation des
esprits ». Et de terminer par cette question : « Est-ce
Dieu ? la gardienne de nos âmes ».
Une vision revigorante de la problématique ovni qui
devrait vous inciter, si le sujet vous interpelle, à vous procurer ce petit
opuscule de 143 pages à l’adresse ci-dessous pour le prix de 119 francs.
Références :
*Didier Gomez, L’EURE des OVNIS, 5 novembre 1990, 19 h,
C. LACOUR Editeur, Place des Carmes- 25 bld Amiral Courbet, 30000 Nîmes.
*Robert Alessandri, 5 novembre 1990 : le creux de la
vague, CERPA, BP. 104, 13363 Marseille.
Depuis, R. Alessandri a complété son dossier sur les
événements du 5 novembre 1990.
Voir : http://perso.numericable.fr/r.alessandri/ufologie/5novembre40cas.html.
Publié dans UFOMANIA, N° 31,
décembre 2001.
Dans ma chronique sur l’actualité de l’Etrange publiée
régulièrement à cette époque dans DIMANCHE Saône & Loire, « à chaud » en date du 3 mars 1991,
soit 10 ans plus tôt, j’écrivais ce qui suit.
L'ovni du 5 novembre
Le 5 novembre dernier vers 19 heures un phénomène lumineux traversa le ciel
d'Ouest en Est.
« Un ovni dans le ciel chalonnais ? » titrait, le lendemain, votre
journal préféré faisant état de témoins à Chalon même et à Farges (« un
triangle isocèle la pointe en avant », était-il précisé, altitude évaluée à
500/700 mètres et vitesse de 150
km/h ), puis plus tard, à Autun, Auxerre, Troyes,
Orléans, Limoges, Tulle, Melun, Evreux, Lyon, Niort et Bordeaux.
Cela correspondait bien à ce que j'avais entendu à
la radio, conduisant mon fils à la gare peu après 19 heures : à savoir une lumière
aérienne signalée depuis la côte atlantique.
Courrier de S. & L. du 6 novembre 1990. |
En fait, il y avait eu des milliers de témoins non seulement en France,
mais en Italie, en Suisse et en Belgique. Sur mon lieu de travail, il se trouva
au moins trois personnes (1/100) à avoir vu quelque chose. En fait les
descriptions variaient de boules orange multicolores (vues à Genève) à 3 à 6
points brillants de lumière (objets en formation ou simple objet éclairé en
divers endroit ?).
Dès le 7 novembre les esprits s'échauffaient : était-ce l'observation
indiscutable que l'on attendait depuis 40 ans ? Charles Garreau, interrogé une fois de plus, répondait - comme d'habitude
- qu'il
se refusait « à tirer une conclusion hâtive ». De même, le service d'expertise
des phénomènes de rentrée atmosphérique (SEPRA, ex-GEPAN), par, la voix de son
inénarrable directeur, recourait à la fameuse formule : « Il n'est pas possible
de se prononcer ».
C'est alors qu'un porte-parole de l'Observatoire Astronomique
de Munich annonça qu'il s'agissait « indubitablement » de l'explosion d'une
météorite. Nonobstant les points brillants, la vitesse apparente, la basse
altitude... Et promettant des précisions jamais venues.
De qui se moque-t-on ?
Courrier de S. & L. du 10 novembre 1990. |
Le SEPRA, pour sa part, remplissait la mission pour laquelle il est payé :
le Service d'Etudes des Phénomènes de Rentrées Atmosphériques concluait que «
c'était une fusée russe » (Proton) rentrant dans les couches denses de
l'atmosphère terrestre (lanceur du satellite de communication Gorizont 21). Fi
de la redondance ! Il valait mieux deux explications qu'aucune.
Quelques objections furent bien émises mais elles n'eurent guère d'écho
dans la presse, laquelle se rallia lâchement à la thèse officielle en
l'agrémentant d'un couplet sur les Martiens : leur débarquement était encore
provisoirement reporté ! Formule éculée qui ne fait rire que les journalistes,
puisque aucun ufologue sérieux aujourd'hui ne défend plus l'origine martienne
des ovnis.
Quant à certains témoins, ils convinrent que l'explication du CNES pouvait
correspondre à ce qu'ils avaient vu (cf. un collègue de travail).
En ce qui
me concerne, j'avais du mal à concilier la version du SEPRA avec le témoignage
d'un pilote d'Air France, en vol à destination de Barcelone, interviewé sur
Europe 1 le 16 ; il avait vu à 19 h 03, « un objet de forme trapézoïdale avec
une douzaine de lumières très distinctes allant du vert au jaune en passant par
l'orange et surtout une grosse lumière plus importante, derrière laquelle il y
avait une traînée de condensation... « Météorite déjà enguirlandée pour la Noël ou rentrée atmosphérique
exotique ?
Comme je ne suis pas un spécialiste, je devais me fier à ceux qui se
prétendent comme tels.
Ce qui
clôtura ma chronique de la semaine.
Depuis,
on a constitué des dossiers des coupures de presse au sujet de cette
observation du 5 novembre 1990. Ainsi peut-on constater que l’occasion avait
été donnée pour un festival de bons mots utilisés par certains journalistes. En
voici quelques-uns datant du 7 novembre :
-
bien
sûr, le classique « Ovnis soit qui mal y pense », bizarrement
orthographié par Le Courrier Picard,
-
le
non moins classique : « Des OVNI comme s’il en pleuvait » de Ouest-France,
-
Le
« Ciel, des O.V.N.I. ! du meilleur effet par Le Dauphiné Libéré,
-
« Quand
pleuvent les ovnis » du Figaro,
montrant une grande inspiration de la rédaction !
Sud-Ouest du 9 novembre révélait que
Jean-Pierre Petit avait affirmé : « Bizarre, Bizarre… », refrain
hautement éclairé repris par Le Progrès
du 9 novembre avec l’avant-titre : « Armée d’ovnis dans le ciel
d’Europe » et un dessin de DuBouillon.
Et on
s’étonne aujourd'hui en 2016 que l’ufologie soit tombée en discrédit. Mais les
médias ont largement contribué à cette déconfiture.
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