mercredi 9 novembre 2016

30 ans de mutilations de bétail en Amérique

Depuis plus de 3 décennies, il se passe sur le continent nord américain quelque chose de bizarre qui défie la raison et mystifie la population rurale ; quelque chose sans précédent en Amérique et ailleurs, du moins à une telle ampleur : des milliers d’animaux de prairies, têtes de bétail et autres spécimens de troupeaux, paissant en liberté ou entre barbelés dans les prés et les champs* – vaches, taureaux, génisses, bouvillons, veaux, chevaux, etc. – ont été retrouvés inertes, exsangues sans aucune trace de sang autour, morts, tués... ?
Si la cause de ces morts est déjà en elle-même mystérieuse (beaucoup de ces animaux ont été dits en pleine santé peu de temps auparavant), c’est surtout l’état constaté des corps qui intrigue : il leur manque des organes essentiels extraits, « prélevés » ; d’où la notion de « mutilations » : oreilles, langue, coupées ras, yeux désorbités et emportés, mâchoire écorchée à vif, comme « raclée », mais aussi mamelles découpées sans entamer les tissus sous-jacents et surtout organes sexuels mâles et femelles excisés et certaines parties internes récupérés d’une façon qui n’a rien de « naturel » [Annexe 1].
Qui se livre ainsi impunément depuis si longtemps à cette vaste opération de chirurgie sélective ? Quelques cas, rares, avec des survivants, indiquent que les blessures peuvent être portées sur la bête encore vivante ; qui, dans ces conditions indéterminées, commet ces actes de torture, d’une inadmissible cruauté, infligés au moins pour certains cas directement in vivo (vivisection) sans laisser la moindre trace au voisinage (même dans la neige) et dans quel but ?
Sûrement pas des gastronomes fins gourmets puisque toute la viande de catégorie A ainsi disponible est gaspillée et livrée à la merci des animaux et oiseaux nécrophages ou bien vouée très vite à la décomposition là où les sociétés d’équarrissage sont encore peu sollicitées. « Je n’ai jamais vu un animal manger juste le devant de la tête d’une vache quand il y a d’autres parties disponibles », s’étonne en décembre 2001, le shérif du comté de Pondera (Montana).
Par-delà les faits patents qui constituent une impressionnante banque de données (près de 3000 cas documentés pour ma part), Etats par Etats, années par années [Annexes 2], avec possibilité d’expression en termes de densité [Annexe 3],  de fréquence, par-delà les « pièces à conviction » constituées par ces restes macabres jonchant les herbages et les pâtures, carcasses disséquées puantes et bourdonnantes de mouches, photos sanguinolentes, l’aspect insensé du phénomène a de quoi surprendre et inquiéter. Rien encore de semblable ou apparenté n’a été constaté en Europe ni en France. Mais attention, l’Argentine, pour la première fois, vient d’être durement frappée.
Certes aujourd’hui les cas sont moins nombreux en Amérique du Nord que dans les années 1975-79 où on a pu en dénombrer plusieurs centaines par an (record en 1975 > 1500) ; depuis 1990, la moyenne annuelle portée à ma connaissance est inférieure à 100. Mais combien restent ignorés, les médias, blasés, ayant maintenant tendance à les négliger, les vétérinaires, échaudés, à refuser d’émettre un diagnostic ?  Tom Adams, le grand spécialiste dans les années 80, parlait déjà de plus de 9 cas sur 10 non rapportés à cette époque. Qu’en est-il en 2002 ?
Le phénomène se produit généralement par « vagues », la dernière notable datant de 1994-95 avec une mini au Montana en 2001 (au moins 25 cas). Tout le territoire nord américain y a été confronté au moins une fois ; épargné à ce jour : un seul des Etat Unis : le Maine. Toutes les provinces canadiennes ont enregistré des mutilations de bétail. Le premier cas, tout emblématique, date de 1967 ; concerné, un petit cheval immortalisé sous le nom de Snippy, qui fut retrouvé avec une large entaille au poitrail et certains organes manquants. Lui est bien devenu un « mythe » car il personnifie la première victime des « mutilateurs » alors que le caractère non naturel de ses blessures est probablement usurpé (effet de panique dû à la foudre + barbelés + décomposition naturelle).
L’évolution du nombre de cas de mutilations de bétail, outre sa diminution actuelle, montre que :
Ø        depuis 1995, le Nouveau Mexique a enregistré plus du quart des mutilations avec des cas signalés tous les ans pendant 9 ans de suite (92-2000). P. Greenwood, collaboratrice du Taos News, interrogée fin juillet, me précise que cette année « tout est calme »,
Ø        l’Oregon, la Californie, la Floride, le Montana et l’Alberta ont été relativement plus touchés depuis 1995 qu’avant,
Ø        l’inverse étant vrai pour l’Arkansas, le Kansas, le Montana, le Nebraska, le Kentucky, le Dakota et le Texas,
Ø        le Colorado reste, après le Nouveau Mexique, un Etat à mutilations avec 7 % des cas depuis 95.
Une enquête a bien été menée en 1979, par le bureau de l’attorney de Santa Fe (NM) ; confiée à un ancien agent du FBI à la compétence contestée,  elle n’a abouti qu’à mettre en accusation les animaux sauvages peuplant les zones incriminées. Ainsi, officiellement, il s’agirait d’un processus tout à fait naturel de « prédation », c’est à dire l’action de « mère nature » entre animaux sauvages et le bétail vivant (proie) et crevé (nécrophagie). Mais les éleveurs n’ont jamais accepté cette explication d’où une polémique persistante. A cet effet, le New Mexican de Santa Fe, Nouveau Mexique, titrait, le 28 mai 2001 : « Des mutilations de bétail laissent les ranchers du Texas perplexes ». Ces professionnels de l’élevage ne reconnaissent en effet pas dans ces blessures les caractéristiques inhérentes aux actes de prédation auxquels ils ont été habitués par les coyotes, busards, écureuils, sconses, belettes et insectes.
Depuis toujours, les parties soustraites sont les mêmes et le modus operandi est immuable : précision pour les ablations dite « chirurgicale », aucune trace de balle, aucune marque de griffe, bref aucun indice pouvant justifier le verdict officiel d’acte naturel. Alors les questions, toujours les mêmes, perdurent.
Pourquoi les prédateurs autochtones du Middle-west auraient-ils brusquement changé leurs habitudes alimentaires dans les années 70 ? Pourquoi perpétuent-ils depuis ces nouvelles coutumes ? Jamais personne n’avait constaté ce type de sévices infligés à ces malheureux bestiaux avant cette époque, prétendent les éleveurs locaux. Les dents des opossums se sont-elles aiguisées comme des rasoirs au point de laisser les mêmes coupures que les couteaux ? Certaines mâchoires se sont-elles échauffées au point de cautériser spontanément les blessures de morsures faisant penser à des incisions laser par « bistouri » ? Les petits animaux sauvages sont-ils si affamés aujourd’hui pour s’en prendre maintenant à certains organes aussi peu comestibles que oreilles, queue, peau arrachée en plaques, etc. ?
« C’est comme si ces incisions étaient faites avec des instruments. Moi, je vous dis, il y a un tas de choses que je ne peux expliquer » (propos de l’éleveur Brian Schweizer, de Whitefish (Montana), rapportés par le Times de New York du 17 septembre 2001).
Diverses autres tentatives d’explications ont été avancées. Elles vont de la malveillance, de la fraude à l’assurance, à l’US Air Force, aux théories les plus extravagantes en passant par un acte délibérément fomenté pour des raisons les plus obscures.
Les sacrificateurs d’animaux dans le cadre d’actes sectaires ont-ils changé de cible et d’échelle (ils étaient réputés s’en prendre à de petites créatures) et multipliés leurs forfaits. On y a cru à une époque avec la naissance possible d’une « super-secte » à tendance sacrificielle ; cette thèse est aujourd’hui abandonnée du fait que les rares humains pris sur le fait se sont révélé de pâles et inoffensifs « copieurs » ou des malades obsédés et pervers en mal de sensations fortes.
L’hypothèse d’un projet secret gouvernemental visant à mener une étude environnementale à travers ces « cobayes » a aussi recueilli l’adhésion d’une certaine partie de la population échaudée par les nombreux exemples de pratiques peu licites des autorités américaines. L’idée d’ainsi disposer de prélèvements d’organes à peu de frais sur des animaux en quasi liberté pour cartographier l’effet de polluants éventuels chimiques, atmosphériques ou radioactifs a séduit les écologistes et bien d’autres… mais sans déboucher sur une accusation en bonne et due forme, laquelle n’aurait manqué, Outre Atlantique, de susciter de vives réactions. On a parlé d’un « Watergate bovin » mais c’est resté au stade de l’invective gratuite. La preuve indéniable que le FBI s’est bien intéressé au phénomène (on dispose de documents officiels dans ce sens) a aussi alimenté la suspicion.
L’éventualité qui a soulevé le plus d’engouement est celle qui veut voir dans ces mutilations de bétail l’intervention d’êtres venus d’ailleurs (extraterrestres). Ce sont certaines traces au sol autour des victimes (et surtout le manque de traces, la plupart du temps) et les lumières célestes non identifiées au-dessus de certains secteurs à mutilations qui ont donné quelque fondement à la thèse extraterrestre, laquelle, sans preuve matérielle (pas de vaisseau spatial photographié au-dessus des troupeaux), est évoquée en désespoir d’autre cause ; ces sévices cruels et apparemment gratuits infligés à de placides ruminants répondent à ce critère d’absurdité qui incite certains à y voir « une logique étrangère venue d’ailleurs ».
Enfin, par contrecoup, - explication officielle insatisfaisante, autres hypothèses non confirmées y compris l’extraterrestre - une théorie psychosociale de « mythologisation » a été réactivée récemment. Elle vise à faire passer les éleveurs américains pour des « primitifs » (thèse de Lévi-Strauss) stressés par le contexte économique, politique, qui, brusquement, se sont mis à voir « autrement » des faits qu’ils constataient depuis des lustres sans rien remarquer d’anormal.
Cette explication, qui n’en est pas une finalement puisqu’elle nie le caractère mystérieux des faits - au même titre que l’hystérie de masse – cherche à banaliser le phénomène en le faisant basculer au rang de « légende rurale », de « fantasme collectif». Or, on sait qu’une légende, par définition, ça ne s’explique pas. On voudrait évacuer le problème sans le résoudre qu’on ne s’y prendrait pas autrement (et c’est bien le but inavoué). Or les mutilations continuent comme, par exemple, cette année, en Alberta, (15/06 : œil/oreille gauche + langue + chair des mâchoires), en Oregon (06/07, Christmas Valley, vache délestée de sa mamelle et de sa zone rectale avec une patte avant littéralement enfoncée dans la poitrine comme si elle avait été lâchée au sol depuis une certaine altitude ...). Qui largue ainsi les animaux mutilés dans les airs pour qu’ils aillent de la sorte s’écraser au sol ? Pas un mythe en tous les cas… « S’il y a un marché noir d’organes de bovins, quelqu’un, au Montana, se fait du fric avec », lit-on sous la plume de K. Silver, dans le LA Weekly du 24/01/2002. Encore une possibilité probablement vite vouée à l’oubli. Et depuis 30 ans cette question qui revient en leitmotiv : QUI ?

* cela va de « l’herbe verte » du Wyoming, de la brousse de chaparral au Texas, aux prairies marécageuses du Missouri et à la végétation steppique du Colorado…


Texte publié sur 4 pages dans VSD Hors-Série n°5 d’octobre 2002.












Annexe 1
Selon une enquête du NIDS (National Institute for Discovery Science, basé à Los Angeles) en 1996 effectuée auprès de 3849 vétérinaires sur tout le territoire américain (taux de réponse 5 %), il apparaît que les mutilations, en pourcentages, affectent par ordre les parties suivantes :
v     rectum/vagin/vulve : 76,1 %
v     oeil: 58,7 %
v     mamelle (pis): 52,2 % et 48,91 pour les tétons
v     langue : 42,4 %
v     muscles de la mâchoire inférieure : 22,8 %
v     oreille : 14,1 %
v     pénis/testicules : 8,7
v     lèvres : 6,5 %
v     autres organes : 4,3 %
v     queue : 1,1 %

Attention : tout cela fait plus de 100 % sachant que rarement un seul organe est trouvé manquant, mais le plus souvent plusieurs (multi-mutilation).

Annexes 2



Annexe 3


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